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À quelques jours de Noël, la BCE réadapte « l’annonce faite à Marie » en la transformant en « l’annonce faite par Mario », attribuant à ce dernier le rôle d’ange exterminateur de la monnaie. En effet, non content d’annoncer une reconduction du quantitative easing dont personne ne doutait, de toute façon, Mario Draghi a finalement entériné la chute inexorable de l’euro face au dollar. Seule bonne nouvelle (alleluia), l’or devrait se maintenir à des niveaux corrects pour compenser.

Jeudi 8 décembre 2016, après avoir entretenu un suspense insoutenable, le directeur de la banque centrale européenne a annoncé la poursuite de la politique d’assouplissement quantitatif au-delà du mois de mars prochain… En fait, tout le monde s’y attendait et les marchés avaient même commencé à acheter cette future arrivée d’argent frais. Car, contrairement à l’objectif visé, toute cette monnaie créée ne vient pas alimenter l’économie productive, mais se retrouve au contraire en grande partie placée bien au chaud en attendant des jours meilleurs. La seule conséquence notable de la poursuite du quantitative easing réside en fait dans l’accélération de la baisse de l’euro amorcée en 2008.

Échec de la politique de la BCE

Finalement, cette annonce sonne un peu comme un aveu d’échec de la banque centrale. Consciente que sa politique ne donne pas les effets escomptés, elle ne peut pourtant plus la suspendre sans plonger les marchés dans un nouveau krach à côté duquel ceux de 2008 ou même de 1929 feraient figure de passage nuageux un jour d’été. À peine Mario Draghi a-t-il consenti à revenir à une « production monétaire » limitée à 60 milliards d’euros par mois à compter du mois d’avril prochain, au lieu des 80 milliards actuellement distribués. On creusera toujours mais avec une pelle un peu plus petite…

Pendant ce temps-là, l’euro continue à valoir de moins en moins face au dollar, pour tout un tas de raisons très techniques que nombre d’économistes se feraient une joie d’analyser… mais aussi sans doute un peu parce qu’à force de noyer la zone euro sous un tsunami permanent de devises, il devient de plus en plus compliqué d’accorder une valeur forte à ce qu’on a en excès. Alors, la bonne nouvelle (provisoire), c’est que cette dévaluation constante de la monnaie commune peut parfaitement s’inscrire dans une stratégie de retour à la compétitivité pour des pays comme la France, l’Italie, ou même pourquoi pas la Grèce, qui vont voir leurs exportations s’apprécier sensiblement. Mais, à force de descendre, l’euro va quitter la zone des effets positifs pour tomber dans l’enfer de l’inflation incontrôlée. Un comble pour une BCE dont le rôle est de justement… réguler l’inflation.

Car, au bout d’un moment, un euro trop faible par rapport au dollar fait perdre beaucoup plus d’argent qu’il n’en fait gagner. D’abord, c’est vrai que les exportations se portent mieux, mais celles-ci ne représentent que 10 à 12% du PIB de la zone euro, le reste de l’activité économique n’étant finalement que peu impacté par une baisse de l’euro. Sauf si elle dure… Car, dans ce cas, il faudra s’attendre à une facture énergétique de plus en plus élevée (sauf erreur, le pétrole se négocie toujours en dollars et pas en euros), qui plus est dans un contexte de remontée des cours du brut peu compatible avec nos ambitions d’inflation contenue. De la même façon, la balance commerciale des pays européens étant généralement déséquilibrée en faveur des importations, celles-ci vont peser de plus en plus lourd dans l’économie et rapidement annuler tous les gains créés provisoirement par l’export.

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Enfin, de leur côté, les épargnants européens ont vu leur pouvoir d’achat en euros reculer d’année en année, et un nombre croissant d’entre eux sont allés placer leur argent sous des cieux plus cléments, généralement indexés sur le dollar… ce qui n’a pas manqué de renchérir davantage le billet vert face aux autres devises, alimentant d’autant plus le décalage avec l’euro. On appelle cela un cercle vicieux…

Quelles conséquences pour l’or ?

Il est devenu très compliqué de prédire quoi que ce soit aujourd’hui, tant il est vrai que les modèles économiques, sur lesquels on pouvait traditionnellement baser les analyses de marchés, semblent tous pris en défaut, les uns après les autres. Il n’y a qu’à voir la manière dont, en 2016, les indices boursiers ont systématiquement déjoué toutes les prévisions pourtant indiscutables sur le plan théorique. le Brexit allait faire s’effondrer les places boursières européennes… et elles ont à peine frémi. L’élection de Donald Trump allait signer l’envol de l’or d’investissement pour compenser une forte baisse du Dow Jones… et l’or a finalement perdu les 2/3 de ses gains de l’année en une semaine tandis que la bourse de New York battait des records historiques. Enfin, le non au référendum italien était appréhendé comme le début de la fin de la zone euro… et les bourses européennes, DAX et CAC40 en particulier ont littéralement explosé à la hausse.

Par conséquent, on peut évidemment se dire que l’or a de tout temps été une valeur refuge en cas de dévaluation monétaire notamment. Et c’est vrai que sur les dix dernières années, en dépit de ses fluctuations parfois brutales, l’or a vu sa valeur au moins multipliée par 3. Peu d’actifs peuvent en dire autant, et il y a fort à parier que la grande défiance envers le système bancaire après 2008 ne soit pas étrangère à cette tendance en faveur des métaux précieux. L’ennui c’est que les cours de l’or et de l’argent d’investissement ont été massivement trafiqués et manipulés par les plus grands acteurs financiers de la planète (dont la Deutsche Bank qui vient d’être de nouveau confrontée à des preuves accablantes en ce sens). Noyé sous l’or papier, l’or physique a été volontairement et artificiellement maintenu à des niveaux de prix très bas. Pour autant, la demande n’a cessé de progresser et, sur le long terme, la stabilité de l’or n’est plus à prouver. Une tendance qui ne s’est jamais vraiment démentie jusqu’ici et qui pourrait se raffermir en cas de dévaluation trop importante des monnaies. Il n’y a qu’à voir ce qui se passe actuellement en Chine, où le yuan ne cesse de dégringoler, tandis que les Chinois accumulent de l’or, y compris par le biais de leur banque centrale, au point d’être devenus aujourd’hui les premiers acheteurs au monde.

Conclusion : si vous possédez de l’or, gardez le précieusement, quel que soit le prix auquel vous l’avez acheté et en dépit de son cours actuel. Sa valeur est ailleurs, et son rôle véritable n’apparaît que lorsque tout le reste s’est effondré, en particulier les devises (l’or redevient alors une monnaie « sûre et honnête »). Si vous ne possédez pas encore d’or, ou si vous souhaitez en acheter, ne vous arrêtez pas à son cours actuel (même s’il est actuellement plus avantageux qu’au début de l’été) car, là encore, sa valeur ne réside pas dans son prix en dollars, mais plutôt dans sa capacité à stocker du capital à long terme.

 

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Anthony Alberti
Entrepreneur depuis vingt ans dans le domaine de la communication et l'information stratégique, il a été amené à travailler plusieurs fois en partenariat avec des banques et des assurances, dont la principale matière d'œuvre était constituée de l'argent des épargnants. Peu complaisant à l'égard de leurs pratiques dont il a entrevu les coulisses, il délivre aujourd'hui régulièrement son analyse sans concession (et souvent piquante) non seulement sur les agissements des professionnels de la finance, mais aussi de tous ceux qui, de près ou de loin, se font les auteurs ou les complices des manipulations qui spolient chaque jour un peu plus les honnêtes citoyens.

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