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De l or sur une salade servie dans un grand restaurant
De l or sur une salade servie dans un grand restaurant

Au cours des siècles, l’or a agité les passions pour le pouvoir et la gloire, pour la beauté, pour la sécurité, et même pour l’immortalité. L’or a été un symbole de l’avidité, un instrument de la vanité, et une contrainte puissante en tant qu’étalon monétaire. Aucune autre matière n’a jamais inspiré autant de vénération pendant une aussi longue période.

Dieu choisit l’or pour le tabernacle où les êtres humains devaient venir lui rendre un culte. Jason vit dans la Toison d’or la clé pour établir sa dynastie. Pour les pharaons égyptiens, l’or servait à confirmer leur magnificence, même dans l’au-delà. Crésus frappa ses statères en or et soudoya la Pythie de Delphes avec de l’or pour être rassuré sur son propre pouvoir. Crassus pensa que l’or pourrait acheter la gloire militaire et il finit avec de l’or fondu versé dans sa gorge. Les Byzantins s’attachèrent à l’or comme instrument de pouvoir et pour maintenir leurs nombreux ennemis à distance. Les Arabes l’utilisèrent, en parallèle avec leur talent militaire, pour ridiculiser le monde avec leur savoir-faire commercial. Les survivants de la Grande Peste se paraient d’or pour célébrer le fait d’être encore en vie.
Colomb pensait que l’or permettait d’accéder au paradis. Les Espagnols dépouillèrent de son or le Nouveau Monde dans une vaine tentative pour dominer l’Ancien. Les Asiatiques absorbaient l’or pour se protéger de l’inconnu. Isaac Newton, un savant qui passa des années à pratiquer l’alchimie, pensait qu’il avait compris la guinée en or, et il sous-estima grossièrement son importance. Les Anglais, et à leur suite les Européens et les Américains, construisirent des systèmes financiers complexes reposant sur l’or, espérant qu’il protégerait leur richesse contre l’irresponsabilité des gouvernements et l’impatience des pauvres. Les Forty-Niners ravagèrent la ferme de Johann Sutter en cherchant à vivre comme des rois. John Stewart MacArthur pensait que le processus de cyanuration lui apporterait la richesse mais il fut contré par encore plus avide que lui. Charles de Gaulle voyait en l’or une arme pour mettre ses rivaux à genoux afin que le monde puisse jouir de l’ordre que lui apporterait la France. Les gnomes de Zurich et les spéculateurs, pendant la fièvre du début des années 1980, se réfugiaient dans l’or comme derrière un bouclier invisible contre l’irrationalité de l’État.

Mais tout cela est de l’histoire. A l’aube du nouveau millénaire, l’or n’est plus au centre de l’univers. Les derniers vestiges des entraves dorées furent jetés par Richard Nixon en 1971. Quand ce Humpty Dumpty tomba de son mur, personne ne voulut vraiment le remettre à sa place. Dépossédé de ses pouvoirs sur le monde de la monnaie, l’or était émasculé. Maintenant l’avidité et le désir de pouvoir prennent d’autres voies. Nous avons renvoyé l’or à son rôle traditionnel en joaillerie et en décoration, même si de petites quantités naviguent dans l’espace ou accélèrent la circulation des bits informatiques. Dans une application encore plus innovante, de l’or 22 carats est saupoudré sur les salades de sashimi, le gigot d’agneau et autres plats de luxe.

Extrait de l’ouvrage de Peter Bernstein « Le pouvoir de l’or : Histoire d’une obsession« 

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Jean-François Faure
Jean-François Faure. Président d’AuCOFFRE.com. Voir la biographie.

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