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Après des années passées à échanger son or contre des dollars ou des livres sterling, le gouvernement canadien a enfin réussi à vider ses coffres, dans lesquels quelque 77 onces finissent de prendre la poussière… en attendant peut-être de se retrouver dans un musée, en souvenir de l’époque ou le Canada stockait sa richesse dans des actifs tangibles.

Le 3 mars dernier, Ottawa était heureux d’annoncer que la dernière tranche de son programme de vente d’or avait été finalisée, portant sur la cession des ultimes 22 000 onces encore dans ses coffres pour la somme de 35 millions de dollars. De l’or particulièrement liquide, d’ailleurs, puisqu’il s’agissait de pièces d’or. Les spécialistes apprécieront le fait que la vente s’est donc conclue quasiment au prix de base de l’or, sans prime ou presque.

Quoi qu’il en soit, le Canada devient ainsi le premier pays du G8 (qui comprend aussi les Etats-Unis, l’Allemagne, l’Italie, la France, la Russie, le Japon et le Royaume-Uni) ne possédant aucun stock d’or.

Une politique contraire à celle des autres pays

Cette décision politique du Canada date en réalité de plusieurs décennies et elle a de quoi surprendre quand on sait que toutes les banques centrales s’accordent sur le fait que l’or reste un marqueur fort de la richesse des États, surtout lors de périodes de turbulences économiques comme celle que le monde traverse depuis maintenant 8 ans et qui mettent à mal les monnaies. Car dans le même temps, tous les autres pays cherchent justement à adosser leurs réserves de valeurs sur le métal précieux . Une préoccupation d’ailleurs suffisamment importante pour inciter la BCE et 12 banques centrales nationales à conclure un accord en 1999 (Washington Agreement on Gold) limitant les quantités de métal vendues chaque année au motif que « l’or est un élément constitutif essentiel des réserves monétaires mondiales« .

Ainsi, en février 2016, les États-Unis détenaient environ 8 133 tonnes d’or (72% de leurs réserves de valeurs, selon le Conseil mondial de l’or) tandis que l’Allemagne en stockait 3 381 tonnes (66% de ses réserves) et la France plus de 2 400 tonnes, soit 60% de ses réserves de valeurs.

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Ces chiffres sont a rapprocher des stocks d’or que possédait le Canada au sortir des années 60, environ 33 millions d’onces dont le pays a décidé alors de se débarrasser car le métal jaune « serait moins rentable que d’autres actifs« . C’est en tout cas ce que pense Don Drummond, ancien haut fonctionnaire aux Finances et porte parole du ministère canadien des Finances qui affirme que le Canada n’a pas intérêt à conserver de l’or « qui n’offre pas de très bons rendements et exige des dépenses pour son entreposage« .

Une mauvaise compréhension de l’or ?

En effet, ce n’est pas vraiment un scoop, l’or n’est pas un placement spéculatif. Et le stocker nécessite à la fois de la place et pas mal de mesures de sécurité. Néanmoins, il semblait acquis par la plupart des experts économiques que l’intérêt de l’or était ailleurs, notamment dans la capacité qu’il offre à son détenteur de stocker de la valeur, ou dit autrement, à protéger son niveau de richesse en le déconnectant des mouvements de monnaies pour le moins aléatoires. Visiblement, cette réalité ne semble pas émouvoir le gouvernement canadien dont la politique, explique toujours M. Drummond « consiste à diversifier son portefeuille en vendant des matières premières supports, comme l’or, pour investir dans des actifs qui sont plus facilement négociables sur les marchés. »

Espérons que les milliers de canadiens qui sont morts pour aller chercher de l’or dans les mines du pays ne feront pas trop de bruit en se retournant dans leur tombe et ne réveilleront pas M. Drummond qui rêve encore du dieu dollar tout-puissant.

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Anthony Alberti
Entrepreneur depuis vingt ans dans le domaine de la communication et l'information stratégique, il a été amené à travailler plusieurs fois en partenariat avec des banques et des assurances, dont la principale matière d'œuvre était constituée de l'argent des épargnants. Peu complaisant à l'égard de leurs pratiques dont il a entrevu les coulisses, il délivre aujourd'hui régulièrement son analyse sans concession (et souvent piquante) non seulement sur les agissements des professionnels de la finance, mais aussi de tous ceux qui, de près ou de loin, se font les auteurs ou les complices des manipulations qui spolient chaque jour un peu plus les honnêtes citoyens.

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