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Le risque d’un renforcement de la valeur de l’or, susceptible d’accroître la puissance d’un futur bloc de l’Est et de précipiter la chute d’une Amérique surendettée, est-t-il à l’origine de l’apaisement brutal des tensions militaires et commerciales qui menaçaient pourtant la stabilité du monde au début de l’année ?

Des tensions internationales qui saluèrent le passage à la nouvelle année, il y a quelques mois à peine, il semble qu’il ne reste plus rien du tout désormais. Qu’il s’agisse des menaces de guerre commerciale entre les États-Unis et la Chine ou, pire encore, des risques d’escalade militaire entre l’Est et l’Ouest comme au « bon vieux temps » de la Guerre Froide, tout semblait concourir à alimenter les craintes d’un nouveau conflit généralisé à l’échelle mondiale.

Et puis, subitement, en quelques semaines seulement, tout le monde est de nouveau rentré dans le rang. Certes, qu’on ne s’y trompe pas, cette détente n’est que de façade et les crispations restent vivaces de part et d’autre de l’Europe qui fait d’ailleurs davantage office de tampon que d’arbitre. Mais le fait est que le climat international semble être redevenu un peu plus respirable.

L’argent plus fort que la politique ?

Beaucoup d’observateurs ont loué la réussite de telles ou telles démarches diplomatiques dont ils sont généralement les seuls à percevoir la portée. D’autres ont vanté les qualités de pondération et de persuasion de certains chefs d’État qui n’ont pourtant pas brillé jusqu’ici par leur intelligence politique. D’autres enfin ont supposé que, tout le monde ayant plus à perdre qu’à gagner dans un conflit ouvert, chacun avait trouvé plus raisonnable de chercher un terrain d’entente.

La réalité tient très certainement pour une bonne part à ces différentes raisons, mais il en est peut-être une autre qu’on omet de souligner et qui a peut-être joué un rôle non négligeable dans la résolution des tensions de ces derniers mois. Dans un monde où, désormais, la loi qui s’impose n’est plus celle du plus fort mais celle du plus riche, certains stratèges de l’ombre ont pu s’inquiéter de la fragilité économique et financière de ceux qui se prétendaient jusqu’ici les maîtres du monde, face au renforcement récent des moyens tangibles détenus par d’autres pays susceptibles de bouleverser radicalement l’équilibre des forces à l’échelle de la planète.

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Ces stratèges, bien que non élus mais œuvrant généralement dans l’ombre des chefs d’État qu’ils conseillent « pour le bien de la Nation », ont certainement senti que le vent pourrait cette fois tourner en leur défaveur en cas de troubles majeurs dans un monde qui n’est plus celui des principaux conflits du XXe siècle dont ils avaient su si bien tirer parti.

L’or et le dollar toujours intimement liés

Depuis près de cinquante ans, les devises de la plupart des pays du monde ne sont plus adossées à l’or, à commencer par le dollar qui est devenu le nouvel étalon monétaire international. Néanmoins, et paradoxalement, on constate que l’or reste particulièrement influencé par la valeur du dollar, dans une relation inversement proportionnelle, alors même que le cours du métal précieux est censé être fixé par le marché, c’est-à-dire par le jeu classique de l’offre et de la demande.

Et force est de constater que, depuis 1971, l’or et le dollar ont connu des destins diamétralement opposés la plupart du temps. Cela s’explique en partie par l’évolution de la valeur du dollar lui-même et la mise en place d’un système monétaire intégralement fiduciaire, sans aucun support matériel tangible. Débarrassés de l’obligation de coller à une quelconque référence physique, les grands trésoriers américains ont littéralement fait exploser la masse monétaire en circulation en créant du dollar comme s’il en pleuvait. De là est née la dépréciation relative du dollar par rapport à l’or, allant crescendo au fil des ans à mesure que l’augmentation massive du crédit faisait gonfler la masse de devises américaines en circulation.

Une autre raison essentielle de la progression du cours de l’or durant les 5 dernières décennies tient à sa nature-même de valeur refuge, laquelle a été fortement sollicitée à de nombreuses reprises face aux multiples paniques boursières et financières qui ont émaillé l’histoire économique mondiale depuis la fin des années 80.

Un dollar fortement dévalué face à l’or et devenu largement impopulaire

Aujourd’hui, après quarante-sept ans d’inflation monétaire continue et de crises économiques répétées, le dollar a perdu 98% de sa valeur par rapport à l’or. Ce faisant, le noble métal est devenu mécaniquement une monnaie potentielle particulièrement forte pour quiconque souhaiterait de nouveau l’utiliser en tant que telle.

Et c’est justement de là qu’est venu le danger, notamment depuis que les deux géants de l’Est, la Russie et la Chine, ont laissé clairement entendre que l’or pourrait de nouveau trouver grâce à leurs yeux en vue d’un nouvel ordre monétaire.

Crises répétées, dette mondiale devenue hors de contrôle, perte de confiance à l’égard des devises traditionnelles, tout concourt aujourd’hui à rendre le système financier basé sur le dollar particulièrement impopulaire aux yeux, non seulement du grand public désormais très bien informé des dérives de l’économie mondiale, mais aussi de certains gouvernements qui n’acceptent plus la domination d’un dollar qui n’est plus que l’ombre de lui-même.

Parmi ces États, nombreux sont ceux dont la situation historiquement désastreuse suffit à expliquer un certain sursaut de révolte alimenté en grande partie par le rejet de régimes politiques despotiques, la difficulté à développer ou à optimiser des richesses économiques limitées, voire l’impossibilité de lutter contre une corruption locale durablement ancrée dans les mœurs. Mais la plupart de ces pays ne jouent qu’un rôle mineur, voire parfaitement négligeable dans l’économie internationale. Autant dire que leurs gesticulations ou leurs protestions n’ont jamais soulevé la moindre inquiétude chez les principaux tenants de la puissance internationale, à savoir les Américains, dont la devise continue malgré tout à régler le pas de l’économie mondiale.

L’entrée en scène de la Russie et de la Chine a peut-être tout changé

Mais récemment, la Russie et la Chine ont elles aussi décidé de rejeter le système hégémonique du dollar pour créer une nouvelle puissance économique, cette fois-ci basée sur du tangible, de la richesse effective, de la bonne et honnête monnaie :bref, sur de l’or.

Et là, les États-Unis ont peut-être sérieusement commencé à s’inquiéter.

D’abord parce que la Russie et la Chine sont loin d’être des petits pays, ils peuvent réellement peser sur la marche du monde au point de faire totalement basculer le rapport de forces de l’Ouest vers l’Est. N’oublions pas que, si les USA restent encore les premiers vendeurs du monde, les Chinois sont quant à eux les premiers acheteurs de la planète, qui plus est détenteurs d’une part non négligeable de la dette américaine. De son côté, la Russie de Poutine reste militairement et économiquement fragile mais elle n’en est pas moins une véritable puissance économique et stratégique, dont les immenses territoires recèlent encore d’énormes quantités de richesses naturelles inexploitées. Avec le jeu des alliances naturelles sur le plan politique notamment, ces deux États pourraient très rapidement être rejoints par d’autres tout aussi désireux d’échapper à un dollar qui les affame et constituer au final un nouveau pôle économique à l’échelle planétaire.

Certes, face à une telle menace, il y a peu de chances que les Américains restent sans rien faire et ils ont déjà mené des guerres pour moins que ça. Mais justement, rien ne dit que ce ne fut pas leur intention jusqu’à ces derniers mois. Sauf que le monde n’est plus ce qu’il était…

Un coup de poker en or

En s’appuyant sur l’or pour leur futur système économique, les Russes et les Chinois ont réalisé un sacré coup de poker. Voilà plusieurs années que les stocks d’or des États-Unis font l’objet de rumeurs portant sur leur éventuelle surévaluation : d’après certains détracteurs, les coffres du trésor américain contiendrait en réalité beaucoup moins d’or qu’annoncé, et l’impossibilité pour quiconque d’aller vérifier de visu contribue largement à alimenter les doutes.

De leur côté, Russes et Chinois affichent sans complexes leurs stocks d’or et sont même « soupçonnés » d’en minimiser l’importance. Du côté européen, en dépit des amitiés de façade à l’égard des USA, on a décidé de parer à toute éventualité en renforçant durablement les stocks d’or nationaux, faisant par exemple de « petits » pays comme l‘Italie ou la France les 3e et 4e plus gros détenteurs d’or au monde, juste derrière l’Allemagne qui vient justement de rapatrier la majeure partie des stocks qu’elle possédait à l’étranger et qui en expose désormais quelques lingots au grand public pour montrer que cet or existe bel et bien.

Pourquoi autant de démonstrations visant à prouver l’existence de cette richesse tangible alors que l’économie et la finance d’aujourd’hui sont basées sur la dette et le crédit ? Toutes les conjectures sont possibles, mais on peut supposer que l’un des nombreux mensonges sur lesquels la Nation américaine a bâti sa grandeur depuis quelques décennies concerne également la quantité d’or réellement en sa possession et qu’en cas de nouveau système concurrent basé sur le métal précieux, les États-Unis se retrouveraient piégés… et potentiellement en faillite !

Les Américains n’ont sans doute plus les moyens de jouer les gros bras

Revenons-en maintenant aux nombreuses tensions qui menaçaient la tranquillité du monde en janvier dernier.

Le conflit en Syrie était sur le point de s’étendre non seulement au reste du Moyen-Orient (comme chaque fois dans la région) mais aussi et surtout à une échelle plus globale avec les menaces de plus en plus appuyées de la Russie qui était prête à défendre le régime syrien en place contre les attaques américaines. Il y a bien eu une opération récente menée conjointement par les Américains, les Anglais et les Français, mais il semble qu’elle ait été plus symbolique que réellement déterminante dans l’évolution du conflit. Une sorte de baroud d’honneur, histoire de ne pas perdre la face avant de passer à autre chose et de laisser les Syriens se débrouiller entre eux.

Dans le même temps, le président américain et son homologue nord-coréen rivalisaient de rodomontades et de menaces militaires qui auraient presque fait oublier l’Iran dans la liste des cibles privilégiées de l’Oncle Sam. Ajoutons à cela les prémisses d’une nouvelle guerre commerciale dure entre Américains et Chinois, et nous avions tous les ingrédients d’incertitude géopolitique et économique susceptibles d’amener de plus en plus d’investisseurs à s’orienter rapidement vers les valeurs-refuges au nombre desquelles l’or conserve une place de choix.

Dans un tel contexte, il n’est pas totalement absurde de supposer que certains conseillers de Donald Trump ont pu se demander si les États-Unis étaient encore en mesure de se permettre le luxe d’une politique aussi belliqueuse. Avec un dollar déjà considérablement affaibli depuis les derniers gros conflits dans lesquels les USA se sont engagés durant les années 1990, avaient-ils encore les moyens de jouer les gros bras de la planète ? Surtout si cela risquait cette fois de renforcer la valeur de l’or et de contribuer ainsi à accroître la force d’un nouveau bloc Russie-Chine… justement basé sur l’or.

Théories et conjectures pour un monde de nouveau apaisé

Évidemment, tout ceci n’est que conjectures et même si le recul des tensions internationales était en partie lié à la menace d’un renforcement de la valeur de l’or, risquant à la fois d’assurer la puissance d’un futur bloc de l’Est et de précipiter la chute d’une Amérique surendettée, l’histoire ne le dira probablement jamais.

Quoi qu’il en soit, les États-Unis semblent avoir définitivement choisi de favoriser l’investissement à la conquête du monde, en décidant notamment de renforcer l’attrait du billet vert par la remontée du niveau de rendement des bons du Trésor américain à 10 ans au-delà des 3%, soit un plus haut de quatre ans. Idem pour les bons à court terme à 2 ans qui ont atteint 2,46%, du jamais vu depuis septembre 2008.

Et pendant ce temps, face à un dollar qui s’apprécie de nouveau et des menaces géopolitiques ou commerciales qui s’éloignent, l’or retrouve un niveau relativement atone qui laisse le temps au monde de la dette de se préparer à un changement que d’aucuns pressentent déjà comme inéluctable et que des pays comme la Russie ou la Chine (mais aussi l’Allemagne dans une moindre mesure) souhaitent d’ores et déjà anticiper.

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Anthony Alberti
Entrepreneur depuis vingt ans dans le domaine de la communication et l'information stratégique, il a été amené à travailler plusieurs fois en partenariat avec des banques et des assurances, dont la principale matière d'œuvre était constituée de l'argent des épargnants. Peu complaisant à l'égard de leurs pratiques dont il a entrevu les coulisses, il délivre aujourd'hui régulièrement son analyse sans concession (et souvent piquante) non seulement sur les agissements des professionnels de la finance, mais aussi de tous ceux qui, de près ou de loin, se font les auteurs ou les complices des manipulations qui spolient chaque jour un peu plus les honnêtes citoyens.

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