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S’il est un exercice obligé en début d’année c’est bien celui des prévisions économiques et sectorielles. Le marché de l’immobilier résidentiel est l’un des plus scrutés par l’ensemble des acteurs économiques en raison de son rôle essentiel dans la croissance et le dynamisme d’une économie… ou sa récession.

En analysant les grandes tendances il ressort de très forts facteurs de risque et d’aussi nombreux et puissants facteurs de soutien permettant à ce jour d’équilibrer la balance.

Des prix au plus haut :
L’envolée des prix des douze derniers mois semble totalement irrationnelle (+20% à Paris, et +9% environ en moyenne nationale). De telles augmentations évoquent toujours une bulle spéculative en formation et/ou sur le point d’exploser. A y regarder de plus près il y a bien des explications à cette envolée. Mais regardons d’abords les épées de Damoclès qui menacent l’immobilier en France.

Des taux au plus bas :
Les taux d’intérêts n’ont jamais été aussi bas. Ils semblent vouloir depuis quelques semaines remonter, ce qui désolvabiliserait mécaniquement un nombre exponentiel d’acheteurs.
Or jamais dans la période contemporaine le pouvoir d’achat immobilier n’a été aussi bas, avec un ratio revenu disponible sur prix au mètre carré catastrophique.
En clair jamais l’immobilier n’a été autant décorrélé du pouvoir d’achat des ménages (voir le Tunnel de Friggit).
L’immobilier est trop cher. Des taux d’intérêts passant de 3.5% à 4.5% auraient donc des effets dévastateurs sur les prix.

Des plans de relance dont l’impact diminue et les conséquences se matérialisent :
Des centaines de milliers de logements neufs ont été construit partout dans le monde y compris en France (et pas toujours au bon endroit) lors de cette dernière décennie avec l’appui des différents gouvernements qui ont tous lancés leurs plans de soutien (robien, scellier etc…) faisant apparaître des zones très excédentaires ou les prix baissent.
Avec la fin des plans de relance, les restrictions budgétaires, et le manque de foncier disponible pour la construction neuve dans les zones à très forte demande il y a de quoi avoir quelques inquiétudes.

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Une tendance baissière dans les grands marchés occidentaux :
Enfin, au niveau international, le marché allemand n’a pas connu l’envolée des prix du marché français de ces dernières années, aux Etats-Unis c’est carrément un krach immobilier qui entraîne avec lui la première économie mondiale, en Espagne les prix s’effondrent, et au Royaume Uni la baisse des prix bien que plus légère est néanmoins réelle et perceptible.
L’immobilier se porte mal en général en occident, et le marché français à terme ne devrait pas faire exception à ce mouvement de correction plus ou moins brutal après plus de 12 ans de hausse.

Bref, le marché immobilier français devrait baisser, pourtant…. il ne baisse pas, il se paye même le luxe d’augmenter.
Quels sont donc les principaux facteurs de soutien pouvant expliquer cette étonnante résistance pour ne pas dire cette santé insolente ?

Tout d’abord « la peur »
Il est symptomatique de remarquer, que la hausse des prix de l’immobilier en 2010 a commencée quelques jours seulement après la médiatisation des problèmes de la Grèce.
De nombreuses personnes ont anticipé une crise des dettes souveraines généralisées et ont adapté leur patrimoine financier en conséquence.
En clairs de très nombreux ménages ont sorti l’argent « en banque » pour le réinvestir dans la pierre, échangeant du cash immatériel contre du tangible qui de plus possède une véritable valeur « d’usage » (on peut loger ses enfants dans un appartement, pas dans un contrat d’assurance vie). Contrat d’assurance vie d’ailleurs dont les rendements financiers baissent fortement améliorant d’autant l’attractivité des investissements immobiliers.

Ensuite « un fort déséquilibre entre l’offre et la demande ».
Au même moment et pour les mêmes raisons à savoir cette inquiétude forte sur d’éventuelles faillites d’Etats, ceux qui était déjà détenteurs d’immobilier le conservent, et ceux qui n’en ont pas cherchent à tout prix à en acquérir, ce comportement renforçant la pénurie d’offre à la vente.
Principe de base de l’économie, en cas de décalage trop fort entre l’offre et la demande, l’ajustement se fait par le prix.
En ce début d’année 2011, la demande d’immobilier résidentiel reste tout aussi dynamique que sur l’année 2010 et les volumes de biens à la vente aussi anémiques.

Des taux bas dont le coût éventuel à hausse serait compensé par le PTZ+
En cas de remontée un peu plus importante des taux, le nouveau dispositif PTZ + (prêt à taux zéro) lancé par le Premier Ministre François Fillon ces derniers jours devrait permettre de compenser d’un côté la perte occasionnée de l’autre par une hausse des taux d’emprunts bancaires.

Un marché locatif dynamique attirant les investisseurs :
Le marché locatif reste très dynamique notamment en Ile de France et sur la façade ouest de notre pays, sans oublier certaines grandes villes.
Le marché immobilier attire aussi de très nombreux investisseurs qui n’ont aucun problème à trouver des locataires, dans le cadre d’opérations plus sécurisées (assurances loyers impayés). Un succès qui ne se dément pas, avec pour beaucoup d’investisseur une optique de préparation de leur retraite, malgré des rendements financiers souvent faible compte tenu des prix du marché (de l’ordre de 2 à 3%).

L’immobilier valeur refuge pour « Stocker de la Valeur » :
C’est un aspect souvent occulté dans la hausse « exubérante » que nous venons de vivre, il convient de reconnaître l’aspect « stockage de valeur » de l’immobilier notamment parisien. Paris est une ville internationale, avec un immense bassin de population, de pouvoir d’achat et d’emplois autours (12 millions d’habitants) et une quantité de foncier limitée. Les investisseurs se servent donc de l’immobilier et en particulier de l’immobilier parisien pour stocker de la valeur et convertir dans un moment de forte incertitude leur monnaie contre des actifs tangibles.

La course vers les actifs tangibles ne fait que commencer :
En réalité nous assistons actuellement à une course vers les actifs tangibles, qu’il s’agisse des matières premières, de l’or ou même d’une certaine façon des actions particulièrement des pays émergeants (qui il ne faut pas l’oublier sont des titres de propriété) et sur lesquels viennent s’investir en masse les liquidités issue de la création monétaire désormais hors de contrôle.

Est-ce donc l’immobilier qui augmente ou le « pouvoir d’achat » monétaire (c’est-à-dire la valeur de la monnaie) qui diminue ? C’est à mon sens dans cette optique qu’il convient de voir l’avenir du marché immobilier pour l’année 2011.

Une aggravation des craintes sur la pérennité de l’euro et sur les dettes d’Etats pourrait propulser le marché immobilier vers des sommets insoupçonnés.

Une brutale remontée des taux d’intérêts sur des anticipations de retour de l’inflation avec une stabilisation du marché monétaire et la mise en place de systèmes efficaces de sauvegarde de la monnaie unique et de gestion de la dette souveraine pourrait entraîner un Krach d’une ampleur inégalée.

Alors hausse ou baisse, ni pour ni contre bien au contraire.
Il se pourrait aussi que ce soit les deux mais à des moments différents, avec au premier semestre 2011 un marché immobilier euphorique le temps que les mécanismes de stabilisation monétaire européens se mettent en place suivi d’un deuxième semestre qui pourrait être désastreux.

Dans tous les cas bien malin celui qui peut dire aujourd’hui avec certitude ce qui sortira de cette année 2011 sur le marché immobilier français qui n’a jamais autant dépendu de paramètres extérieurs immaîtrisables et de l’Histoire qui s’écrira dans les mois à venir.

Charles SANNAT


Chargé d’Affaires BNP Paribas

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Jean-François Faure
Jean-François Faure. Président d’AuCOFFRE.com. Voir la biographie.

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