Publicité

On la dit moribonde, sur le déclin, amorçant désormais la douloureuse descente vers une prochaine pénurie après un pic qui aurait eu lieu en 2015 (ou 2014… ou 2016…). Et pourtant, un rapport de BMI Research indique que la production mondiale des mines d’or se redresse et va même continuer à progresser, voire s’accélérer, pour les années à venir.

Cette prévision peut paraître contre-intuitive au regard du prix du métal jaune qui, aujourd’hui, semble se stabiliser aux alentours de 1200 dollars l’once. Ce qui pourrait être de nature à freiner les investissements. Or, il n’en est rien, bien au contraire. Car il faut comprendre que le marché de la production aurifère répond à un cycle long, s’étalant souvent sur plusieurs années entre l’ouverture d’une mine et son exploitation proprement dite.

Les mines sont désormais plus rentables

Les mines ouvertes il y a dix ans l’étaient sur la base d’une once à 600 dollars et jusqu’au pic de 2011 (qui n’a duré que quelques semaines avant de redescendre) les exploitations ont eu souvent du mal à être rentables. Aujourd’hui, avec une once valorisée à un niveau deux fois plus élevé d’une part, et des avancées technologiques qui font baisser les coûts de production d’autre part, il est désormais possible d’envisager la mise en exploitation de gisements qui n’auraient pas été rentables il y a encore quelques années.

Ainsi, sur la base d’un cours de l’or somme toute assez stable depuis de longs mois, voire en légère progression moyenne, le cabinet BMI Research prévoit « une augmentation de la production mondiale d’or de 105 millions d’onces en 2018 à 125 millions d’onces en 2026, avec une croissance annuelle moyenne de 2,3%. » Quant aux prix du métal doré, le cabinet prévoit qu’ils continueront de progresser de manière modérée mais régulière pour atteindre une moyenne de 1300 dollars l’once en 2018.

Ces investissements asiatiques qui boostent la production

Bien évidemment, comme pour beaucoup de métaux, la croissance chinoise n’est pas étrangère au phénomène et le géant asiatique augmente chaque année ses investissements dans les mines d’or étrangères, ce qui contribue à soutenir durablement les cours. En effet, même si elle reste le premier pays producteur, la Chine est également le premier consommateur d’or (même si elle échange régulièrement sa place avec l’Inde en fonction des périodes de l’année). Et les 16,5 millions d’onces produits par la Chine semblent désormais insuffisantes pour répondre aux besoins du marché intérieur.

Publicité

Toujours selon BMI Research, en 2016, la région Asie-Pacifique représentait 44,7% des activités mondiales de production aurifère, tout en soulignant que certaines des plus importantes transactions ont été justement réalisées par des entreprises chinoises. Ainsi le conglomérat chinois Fosun International, lequel a investi la bagatelle de 890 millions de dollars auprès du producteur d’or russe Polyus Gold, mais aussi par Shandong Gold qui a acheté, pour 960 millions de dollars, 50% des parts du canadien Barrick Gold et de sa mine de Veladero en Argentine. Toujours en 2016, China National Gold Group a racheté la mine d’or Jinfeng au canadien Eldorado Gold pour 300 millions de dollars. Mais la palme de l’investissement revient tout de même à société indonésienne PT Amman Mineral International qui a déboursé pas moins de 1,3 milliard de dollars pour acquérir l’une des plus grandes mines à ciel ouvert de cuivre et d’or du pays, Batu Hijau, détenue jusqu’ici par une compagnie américaine.

Bref, on le voit, l’Asie croit en l’or, et surtout en ses capacités de réserves, et n’hésite pas à investir des sommes considérables pour détenir un maximum de sites d’exploitation.

La production augmente également partout ailleurs

L’autre grand acteur du secteur de la production aurifère est l’Australie. La faiblesse du dollar australien couplée à une production en hausse pour les raisons précitée accroissent sensiblement les marges bénéficiaires des exploitants locaux, ce qui rend d’autant plus rentable une activité qui avait eu tendance à marquer le pas ces derniers temps. L’Australie pourrait donc confirmer son rang de deuxième plus grand producteur d’or dans le monde en passant de 10.8 millions d’onces en 2018 à plus de 13.2 millions d’onces à l’horizon 2026, soutenue par une progression moyenne de 3.1% par an.

Même les États-Unis pourraient connaître une croissance soutenue de la production aurifère, en particulier grâce à l’assouplissement des exigences gouvernementales prônées par l’administration Trump. Certes, ce n’est pas une très bonne raison, mais de plus en plus de producteurs ont compris que les investisseurs devenaient réticents à acheter de l’or « sale », c’est-à-dire produit sans respecter à la fois l’environnement et les individus. Ce faisant, on peut raisonnablement supposer que la déréglementation fédérale sera compensée par une prise de responsabilité des société minières, à l’instar de celles qui appliquent d’ores et déjà les principes du label « Clean Extraction« .

L’influence sur les cours de l’or

Reste une question fondamentale : l’augmentation de la production, et donc de la quantité d’or disponible sur le marché, va-t-elle jouer en faveur ou plutôt en défaveur des cours du métal précieux. En effet, l’un des plus vieux principes de l’économie repose sur le fait que plus un produit est rare et plus il est cher.

En réalité, c’est vrai que l’offre va croître, avec comme conséquence une tendance naturelle à faire baisser les prix. Mais la demande croît beaucoup plus vite et, même avec ce nouvel arrivage « d’or frais » sur le marché, la production restera toujours en-deçà de la demande. Donc les prix continueront à s’apprécier suivant une courbe probablement modeste (dans les premiers temps) mais régulière.

Des éléments extérieurs en faveur d’un cours élevé pour l’or

Ajoutons à celà deux phénomènes majeurs qui se profilent à l’horizon. Le premier, c’est la fuite en avant inéluctable des économies modernes dont on sent depuis quelque temps déjà les limites et qui semblent nous précipiter vers une série de crises de plus en plus rapprochées et violentes. Des crises, ou même des krachs qui ne veulent pas dire leur nom et qui poussent de plus en plus d’acteurs majeurs de la finance internationale (banques centrales, hedge funds, milliardaires aguerris…) à acquérir un maximum d’or tant que les cours sont bas, pour protéger l’essentiel de leur patrimoine.

Le second phénomène est celui qui occupe les médias en ce moment : le bitcoin. Quand la bulle des crypto-monnaies (qui ne sont pas des monnaies, d’ailleurs, mais uniquement des instruments de spéculation poussés à leur paroxysme) aura explosé, nul ne sait combien de milliards de dollars ou d’euros seront partis en fumée. On parle surtout du bitcoin, qui représenterait aujourd’hui, suivant les estimations, entre 150 et 170 milliards de dollars. Mais on sait qu’il existe au bas mot plusieurs centaines de crypto-devises dont le total investi avoisinerait les 200 milliards de dollars.

L’or véritable finira par chasser « l’or virtuel »

Que se passera-t-il lorsque le bitcoin s’effondrera et que les spéculateurs auront compris qu’ils n’ont acheté que du vent ? Qu’ils ne possèdent rien en échange du risque qu’ils ont pris, ni bien immobilier, ni part d’entreprise, ni sous-jacent tangible, ni même un droit quelconque sur quoi que ce soit. Nul doute que la raison reprendra le dessus et que les actifs tangibles redeviendront la préoccupation essentielle des investisseurs. Surtout si, entre temps, les politiques monétaires désastreuses menées actuellement finissent par totalement déconnecter les marchés de la réalité économique.

Car s’il y a bien une chose positive que le bitcoin et ses clones auront rappelée au public, c’est qu’une monnaie peut parfaitement exister en-dehors du secteur bancaire. Certes, une dose de régulation reste nécessaire pour éviter les excès, mais les banques ne doivent être que des facilitatrices d’échange, et non pas les créatrices toutes puissantes de la monnaie proprement dite. Et c’est pourtant ce qu’elles ont fini par devenir, supplantant jusqu’aux États eux-mêmes dans leur pouvoir le plus souverain vis-à-vis de leur économie.

L’or possède exactement cette qualité de monnaie indépendante (et il l’a eue de manière presque exclusive pendant plusieurs millénaires). Mais à la différence du bitcoin, celui qui possèdera une once pourra bien voir le cours de celle-ci monter ou descendre à loisir, à la fin, il lui restera toujours une once d’or et sa valeur intrinsèque restera inchangée, totalement indépendante des caprices bancaires.

Rare par sa nature, déconnecté du réseau bancaire par sa philosophie, le bitcoin est un peu comme de « l’or virtuel » qui en présenterait tous les risques exacerbés sans le moindre de ses avantages. En revenant à la raison, quitte à en passer par un krach douloureux, nombreux seront ceux qui comprendront qu’il vaut mieux s’intéresser à l’or original, sonnant et trébuchant, plutôt qu’à l’une de ses pâles copies.

Article précédentVera Vita, une pièce d’or, un bijou, une Belle Épargne
Article suivantLe niveau record du Dow Jones annonce-t-il l’une des plus graves crises depuis 1900 ?
Anthony Alberti
Entrepreneur depuis vingt ans dans le domaine de la communication et l'information stratégique, il a été amené à travailler plusieurs fois en partenariat avec des banques et des assurances, dont la principale matière d'œuvre était constituée de l'argent des épargnants. Peu complaisant à l'égard de leurs pratiques dont il a entrevu les coulisses, il délivre aujourd'hui régulièrement son analyse sans concession (et souvent piquante) non seulement sur les agissements des professionnels de la finance, mais aussi de tous ceux qui, de près ou de loin, se font les auteurs ou les complices des manipulations qui spolient chaque jour un peu plus les honnêtes citoyens.

LAISSER UN COMMENTAIRE

Veuillez entrer votre commentaire !
Veuillez entrer votre nom ici