Les alchimistes en rêvent depuis la nuit des temps, et le Conseil européen pour la recherche nucléaire (Cern) l’a fait : il est possible de transformer le plomb en or grâce à un accélérateur à particules. Cette découverte scientifique peut-elle bouleverser le marché au point de faire chuter le cours de l’or ? Spoiler : non, et on vous explique pourquoi.
Changer du plomb en or, un (très) vieux rêve d’alchimiste
Il faut remonter à l’Antiquité pour trouver les premières traces de transformation de matières, en Grèce ou en Égypte ancienne notamment. Mais c’est au Moyen Âge que la pierre philosophale et l’alchimie ont véritablement connu leur âge d’or. Au VIIIe siècle, l’alchimiste Jabir ibn Hayyan (aussi connu sous le nom de Geber) élabore la théorie selon laquelle l’or et l’argent pourraient être issus d’autres matériaux, à condition de leur appliquer le bon traitement chimique. Au fil des siècles, de nombreux alchimistes et scientifiques, comme Nicolas Flamel, cherchent (et prétendent trouver) la pierre philosophale capable de transformer les métaux vils en or.
De nos jours, la pierre philosophale est surtout apparue dans la littérature ou au cinéma (coucou Harry Potter). Mais grâce à la physique nucléaire, les sciences modernes ont réussi à montrer qu’un accélérateur à particules pouvait aboutir à la fabrication d’or à partir de plomb. Une expérience coûteuse qui n’avait encore jamais été mise en pratique… jusqu’à aujourd’hui.
Comment le Cern a-t-il réussi à produire de l’or à partir de plomb ?
Trois protons : c’est la différence entre la composition du plomb (qui compte 82 protons) et celle de l’or (qui en contient 79). La recette est simple : il « suffit » d’enlever ces trois protons au plomb pour que celui-ci devienne de l’or. Pour réussir ce tour de force, l’équipe ALICE (A Large Ion Collider Experiment) du Cern a utilisé un procédé « basé sur des quasi-collisions de noyaux de plomb ». Autrement dit, des interactions au cours desquelles les composants passent très proches les uns des autres mais sans entrer en collision. Et ce à une vitesse proche de celle de la lumière. L’expérience est expliquée en détails sur le site du Cern.
C’est cette méthode qui a permis d’enlever trois protons au plomb, et d’aboutir à la formation d’or. Une véritable révolution pour la science, qui permet notamment de mieux comprendre les interactions entre les particules.
La transformation du plomb en or peut-elle bouleverser le marché ?
Au-delà des avancées scientifiques, la possibilité de fabriquer de l’or pose forcément d’autres questions en matière d’industrie, de commerce et d’économie. Rappelons qu’à l’heure actuelle, l’or est produit à partir des mines et du recyclage. Il s’agit d’un métal précieux rare et d’une valeur refuge pour les investisseurs, avec un cours qui bat des records actuellement. Si l’or se fait moins rare, cela modifierait profondément l’offre et la demande, avec des répercussions sur le cours qui évoluerait alors à la baisse. Mais nous n’en sommes pas encore à une fabrication industrielle d’or à partir de plomb !
L’expérience du Cern a permis de former 29 picogrammes d’or, ce qui correspond à 0,000 000 000 029 gramme : très loin des 31 grammes d’une once ! « Le total reste cependant des milliers de milliards de fois inférieur à la quantité qu’il faudrait pour fabriquer un bijou », souligne le Cern. Autre problème : les noyaux d’or produits sont instables, et n’existent que pendant une fraction de seconde avant de disparaitre. La réponse est donc toute trouvée, le cours de l’or n’est pas près d’être influencé par cette découverte.
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