Quel cours de l’or en cas de stagflation ?

par | 3 Nov 2025 | Or | 0 commentaires

Temps de lecture : 5 minutes

L’économie américaine continue d’afficher un taux de croissance positif. Cela dit, la situation se tend sur le marché de l’emploi, alors que l’inflation reste à un niveau élevé. Et si la plus grande économie mondiale basculait dans la stagflation : jusqu’où le cours de l’or pourrait-il monter ?

Commençons avec un rappel…

record cours de l'or

Est-ce que l’or suit l’inflation ?

La réponse est « oui, mais ».

Je m’explique. Contrairement à ce qu’on lit à droite à gauche, la relation qu’entretient le cours de l’or avec l’inflation est plus compliquée qu’il n’y paraît.

Comme je l’ai expliqué en vidéo :

  • L’or tend effectivement à bien protéger les investisseurs contre un niveau d’inflation élevé ou très élevé ;
  • Mais le lien qui unit le cours de l’or et l’inflation tient plus à la tendance de cette dernière qu’à son niveau ;
  • Enfin, l’or performe d’autant mieux que l’inflation est à la fois en hausse, et élevée. 

On est donc loin du poncif selon lequel « l’or protège de l’inflation », n’est-ce pas ?

Ceci posé, venons-en à un autre contexte économique : la stagflation…

Qu’est-ce que la stagflation ?

La stagflation, c’est la situation d’une économie qui souffre simultanément de deux maux : une stagnation de la croissance économique + un niveau d’inflation en hausse ou élevé. Un autre symptôme de la stagflation est un taux de chômage élevé.

Ce mot-valise, contraction de « stagnation » (de l’activité économique) et d’« inflation »,a été forgé en novembre 1965 par l’homme politique britannique et futur Chancelier de l’Échiquier Iain Macleod. À l’époque, le Royaume-Uni était le grand malade du monde occidental, alors que les autres économies développées traversaient les « Trente Glorieuses ». Avec le premier choc pétrolier en 1973, cette période de forte croissance est cependant arrivée à son terme : la stagflation s’est étendue à une grande partie des économies occidentales, et les années 1970 sont restées dans les annales comme l’ère de la stagflation.

La stagflation : un scénario réaliste, en 2025 ou en 2026 ?

L’économie américaine commence à avoir du plomb dans l’aile. Comme le rapportait BFM TV le 24 septembre : « Le comité consultatif économique de l’association bancaire ABA, constitué de 16 économistes des plus grandes banques américaines, pense désormais que la première économie mondiale connaîtra, au dernier trimestre 2025, une croissance de 1,3% sur un an. Cela représente un fort ralentissement par rapport à la même période en 2024, où une croissance de 2,5% sur un an avait été enregistrée. »

Très bien, mais qu’en pense la Fed ?

Le 22 août, à Jackson Hole, Jerome Powell a opéré un revirement majeur : le président du Conseil des gouverneurs a en effet ouvert la porte à un nouveau cycle de baisse de taux en invoquant une raison qui a stupéfait les marchés. Cette déclaration a en effet été justifiée par le fait que le marché du travail se détériorait… mais alors même que l’inflation persiste, voire se redressait ! Or en principe, en cas de hausse du niveau des prix, les banques centrales ne baissent pas leurs taux directeurs : au contraire, elles les remontent, en vue de refroidir une économie qui surchauffe sous l’effet de l’accroissement de l’activité. Sauf qu’en l’occurrence, l’économie américaine ne surchauffe pas : elle ralentit, comme en témoigne la dégradation des chiffres relatifs à l’emploi !

Et face à deux objectifs désormais contradictoires (soutenir l’activité économique et contenir l’inflation), Jerome Powell a dû trancher : ce sera le soutient de la croissance… et tant pis pour l’inflation !

Voilà pourquoi la « stagflation » a fait son grand retour dans les tendances sur le Twitter (ou plutôt le X) financier.

Depuis, une première baisse de taux de -0,25% est intervenue le 17 septembre (la première en 30 ans alors que l’inflation sous-jacente est si élevée), et le marché table sur 2 baisses de taux supplémentaires en 2025.

Ce n’est pas tout.

Pour le moment, la Fed conserve une relative indépendance par rapport à l’Administration Trump. Or le mandat de Jerome Powell arrivera à son terme en mai 2026. À ce moment-là, Donald Trump pourra placer l’un de ses pions à la tête de la Fed, et prendre le contrôle de la banque centrale. Rien n’empêchera plus alors la grande fusion de la politique budgétaire et de la politique monétaire et, peut-être, le grand retour du contrôle de la courbe des taux en vue de financer un déficit budgétaire en roue libre.

Voilà ce qui explique la hausse des taux d’intérêt sur le marché obligataire américain, et le rallye du cours de l’or depuis le 22 août.

Les conséquences de cette situation pourraient se révéler épiques, et ce jusqu’à la fin de la décennie en cours…

Qu’arrive-t-il à l’or en cas de stagflation ?

Dans les années 1970, l’agrégat monétaire américain M2 a augmenté en moyenne de +9,7% par an.

Comment le cours de l’or a-t-il réagit à cette explosion de la masse monétaire ?

Sur la première moitié de la décennie, il a augmenté de +452%, puis encore de +162% au cours de la seconde moitié de la décennie, avant de clôturer son marché haussier en apothéose, avec une hausse de +63% supplémentaires au cours des 3 premières semaines de 1980.

Quel est le meilleur investissement en période stagflationniste ?

Comme le rappellent Stöferle et Valek (S&V) dans leur rapport In Gold We Trust 2025, le cours de l’or a fait l’objet d’un taux de croissance annuel composé moyen (TCAC) de +26,6% dans les années 1970. C’est bien sûr une performance exceptionnelle, mais… notez que l’argent-métal a fait encore mieux, avec un TCAC de +32,8% !

Autrement dit : historiquement, il apparaît que la stagflation est l’environnement macroéconomique idéal pour que les cours de l’or et de l’argent se déchaînent !

Est-il judicieux d’acheter de l’or en ce moment ?

Il est vrai que depuis le discours de Powell à Jackson Hole, le cours de l’or s’est beaucoup apprécié.

Faut-il considérer qu’il est déjà trop élevé ?

Tout d’abord, sachez que du point de vue de S&V, l’environnement actuel n’a pas grand-chose à envier à celui des années 1970, que ce soit en termes d’endettement ou de tensions géopolitiques – un constat que je partage.

Ensuite, pour vous aider à répondre à cette question, je soumets à votre sagacité cet extrait du rapport IGWT 2025 (publié le 15 mai, je le rappelle) : « Le cours de l’or ayant récemment connu une forte hausse, il semble judicieux d’envisager un scénario similaire à celui des années 1970, caractérisé par l’inflation ou la stagflation, c’est-à-dire un scénario de risque extrême avec une forte pression à la hausse. Dans ce cas, le cours de l’or atteindrait environ 8 900 $ d’ici la fin de la décennie, ce qui correspondrait à un taux de croissance annualisé d’environ 19 %. Dans ce scénario, l’objectif intermédiaire pour fin 2025 se monte à 4 080 $. »

Autrement dit : l’hypothèse conservatrice de S&V d’un cours de l’or à 4 821 $ d’ici la fin de la décennie s’efface de plus en plus derrière leur hypothèse d’un cours de l’or qui augmenterait jusqu’à 8 926 $ fin 2030, sous l’effet d’une croissance monétaire similaire à ce que les Etats-Unis ont connu dans les années 1970.

Le cours de l’or semble donc encore avoir beaucoup de potentiel.

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Perrin, Nicolas
Diplômé de l’IEP de Strasbourg, du Collège d’Europe et titulaire d’un Master 2 en Gestion de Patrimoine, Nicolas Perrin a débuté sa carrière en tant que conseiller en gestion de patrimoine. Auteur de l’ouvrage de référence "Investir sur le Marché de l’Or : Comprendre pour Agir", il est désormais rédacteur indépendant. Il s’intéresse au libéralisme, à l’économie et aux marchés financiers, en particulier aux métaux précieux et aux crypto-actifs, sans oublier la gestion de patrimoine. Twitter : @Nikookaburra

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