ÉDITO – La relique barbare, ou le syllogisme des hypocrites

par | 14 Mar 2016 | Or | 0 commentaires

Temps de lecture : 3 minutes

Il y a quelques jours, un Ă©minent spĂ©cialiste de l’Ă©conomie française (dont je tairai le nom pour mĂ©nager sa rĂ©putation d’expert) expliquait au micro d’une non moins prestigieuse radio nationale que « seuls les idiots croient gagner de l’argent en investissant sur l’or ; donc si vous n’ĂȘtes pas idiots, fuyez les entreprises qui vous proposent d’acheter de l’or. »

J’avoue que j’ai eu du mal Ă  choisir entre le sourire et l’agacement, car voilĂ  typiquement le genre de discours que manient les tenants de l’Ă©conomie actuelle pour entraĂźner un maximum de gens vers leur perte. Mes mots ne sont pas trop forts : les prĂ©tendus experts qui servent ainsi la soupe aux apprentis sorciers du crĂ©dit-monnaie ne font rien d’autre que d’inciter les acteurs Ă©conomiques Ă  alimenter toujours plus une machine qui s’est emballĂ©e depuis longtemps, dans le but d’en retarder simplement l’explosion.

or valeur refuge relique barbare

Un marteau, ça ne se mange pas

NĂ©anmoins, force est de reconnaĂźtre que leur stratĂ©gie est bien rodĂ©e, car ils partent d’un argument rigoureusement exact, parfaitement imparable, pour en dĂ©duire une conclusion totalement absurde : le syllogisme abusif dans toute sa splendeur. Oui, Ă©videmment, acquĂ©rir de l’or dans un but spĂ©culatif est un non-sens. L’or physique n’est pas un actif susceptible de gĂ©nĂ©rer un rendement, c’est ce qu’on appelle une valeur refuge, permettant de stocker de la valeur Ă  l’Ă©cart des fluctuations de monnaies ou de marchĂ©s (particuliĂšrement violentes en ce moment, ce qui explique la remontĂ©e des cours du mĂ©tal prĂ©cieux depuis le dĂ©but de l’annĂ©e). Mais partir de cette qualitĂ© intrinsĂšque pour conclure que, justement, c’est un actif Ă  fuir, cela revient Ă  dire que puisqu’un marteau n’est pas comestible, on devrait arrĂȘter d’acheter des marteaux. C’est absurde, on est bien d’accord.

4500 milliards d’Ă©pargne immĂ©diatement disponible

En rĂ©alitĂ©, notre expert mĂ©diatisĂ© n’est pas idiot, lui, et il est certainement conscient du ridicule de ses affirmations (enfin, espĂ©rons-le !). Mais il est prĂȘt Ă  prendre le risque de passer pour un imbĂ©cile auprĂšs de quelques auditeurs avertis, si son discours a une chance de convaincre un maximum de gens moins versĂ©s dans l’Ă©conomie rĂ©elle. Car, comme Ă©voquĂ© plus haut, le but visĂ© n’est autre que de dĂ©tourner l’Ă©pargne des Français vers cette Ă©norme machine Ă  produire de la monnaie par le biais du crĂ©dit. En France, on considĂšre que l’Ă©pargne reprĂ©sente plus de 10 000 milliards d’euros, rĂ©partis Ă  55% dans les actifs immobiliers et 45% dans les livrets, plans d’Ă©pargne et autres contrats d’assurance-vie. Le rĂȘve des banquiers centraux (et aussi des États), ce serait de persuader les dĂ©tenteurs de cette Ă©pargne inactive (qui reprĂ©sente quand mĂȘme, pour les seuls actifs liquides, plus de deux fois le PIB annuel de la France) de l’utiliser rapidement, ce qui aurait pour effet secondaire de booster la consommation et donc de crĂ©er une certaine forme de croissance, avant de les amener Ă  s’endetter pour continuer Ă  consommer.

On ne le rĂ©pĂštera jamais assez : aujourd’hui, la monnaie est créée par le crĂ©dit. Si personne ne s’endette, les banquiers centraux ne s’enrichissent plus. Or, on le sait maintenant, en leur transfĂ©rant le pouvoir rĂ©galien de crĂ©er de la monnaie, les États ont surtout donnĂ© aux banques les clĂ©s, non seulement de leur Ă©conomie, mais aussi tout simplement de leur avenir.

L’or est intemporel, pas les monnaies

Avec l’or, les citoyens ont la possibilitĂ© de protĂ©ger leur avenir, individuellement, en dehors des circuits financiers traditionnels de plus en plus cloisonnĂ©s. Et surtout hors d’atteinte des systĂšmes de contrĂŽle ou de manipulation des cours qui font et dĂ©font l’Ă©conomie moderne.

Alors, certes, l’or est toujours cette « relique barbare » qui fait souvent passer son dĂ©tenteur pour un vieux conservateur poussiĂ©reux, enkystĂ© dans ses rĂ©flexes protectionnistes d’un autre Ăąge. Mais la rĂ©alitĂ© c’est qu’en dehors de quelques pĂ©riodes trĂšs brĂšves dans l’histoire oĂč la richesse s’est vue dĂ©connectĂ©e des actifs tangibles (pĂ©riodes qui ont systĂ©matiquement fini sur des Ă©checs dramatiques), l’or a toujours servi de fondement Ă  l’Ă©conomie des hommes depuis prĂšs de 6000 ans.

Et on aura beau user d’artifices de communication Ă  l’aide d’arguments en apparence logiques (critĂšre de pertinence), marteler les messages dissuasifs dans tous les mĂ©dias (critĂšre d’autoritĂ©), et terminer sur la nĂ©cessitĂ© de soutenir l’Ă©conomie au lieu de chercher Ă©goĂŻstement Ă  protĂ©ger ses avoirs (critĂšre de culpabilisation), les faits parlent d’eux-mĂȘmes.

Donc, puisque vous n’ĂȘtes pas idiots, fuyez plutĂŽt les gens qui vous promettent de vous enrichir en vous endettant.

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Faure, Jean-François
Jean-François Faure. PrĂ©sident d’AuCOFFRE.com. Voir la biographie.

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