Lors de la Rencontre Annuelle du 26 novembre, nous avons Ă©tĂ© honorĂ©s de la prĂ©sence de Jim Rickards. Nous en avons profitĂ© pour lui poser des questions Ă propos de son livre, et notamment sur la possible remonĂ©tisation de lâor, sur lâinfluence rĂ©elle du PrĂ©sident des Etats-Unis et sur lâor comme monnaie « open-source », un sujet dâactualitĂ© qui nous tient particuliĂšrement Ă cĆur !
A propos de Jim Rickards
Jim Rickards est rĂ©dacteur en chef dâIntelligence StratĂ©gique, une lettre dâinformation financiĂšre ainsi que de deux autres services dâinvestissement consacrĂ©s aux devises et Ă lâanalyse gĂ©opolitique. Ancien avocat dâaffaires, Ă©conomiste et banquier dâinvestissement avec 35 ans dâexpĂ©rience Ă Wall Street, Jim est Ă©galement consultant auprĂšs de la CIA. Il est lâauteur de Currency Wars, The Death of Money, New Pledge for Gold et de Road to Ruin, tous des best-sellers du New York Times. En France, seul Le Nouveau Plaidoyer pour lâor est pour lâinstant disponible.
1. Dans Nouveau Plaidoyer pour lâor, vous expliquez quâun retour Ă lâĂ©talon-or est possible, Ă condition que le cours de lâor fixĂ© soit stable et non dĂ©flationniste. Quel devrait ĂȘtre le cours de lâor actuellement en fonction de la masse monĂ©taire pour quâil soit Ă©talon ?
Jim Rickards – Bonjour, je suis ravi dâĂȘtre Ă nouveau ici Ă Paris, câest lâune des plus belles villes du monde et je suis toujours heureux dây revenir. Pour rĂ©pondre Ă votre question, si le monde ou un pays donnĂ© devait revenir Ă un Ă©talon-or, il serait essentiel de fixer correctement le cours du mĂ©tal jaune.
Tout Ă©talon-or exprime une relation entre lâor physique et lâargent papier, ou une autre forme de monnaie fiduciaire. Nous nâallons pas commencer Ă nous promener avec mes poches pleines de piĂšces dâor. Nous le pourrions, dans un cas extrĂȘme, mais le scĂ©nario le plus crĂ©dible est que lâEtat dĂ©tient de lâor et Ă©met une monnaie. Cette monnaie, par contre, est couverte par de lâor et Ă©changeable contre ce mĂ©tal Ă un taux fixe : vous pouvez donc avoir toute confiance en sa valeur.
Mais comment fixer le prix ? Aujourdâhui, le prix de lâor sur le marchĂ© est dâenviron 1180 dollars de lâonce. Il a Ă©tĂ© assez instable ces derniers temps, et a baissĂ© un peu rĂ©cemment. Le cours est consultable sur internet. Mais est-ce lĂ le bon taux pour un Ă©talon-or ? La rĂ©ponse est non.
Pour illustrer mon propos, une petite leçon dâhistoire sâimpose : en 1925, le monde a dĂ» faire face au mĂȘme problĂšme. Avant 1914 et la PremiĂšre Guerre mondiale, la plupart des grands pays dĂ©veloppĂ©s du monde, comme la France, le Royaume-Uni ou les Etats-Unis, utilisaient un Ă©talon-or. AprĂšs cela, ces pays ont abandonnĂ© lâĂ©talon-or pour financer lâeffort de guerre : ils ont Ă©tĂ© forcĂ©s dâimprimer de lâargent, ce qui, dans ce genre de circonstances, Ă©quivaut Ă emprunter de lâargent Ă ses propres citoyens. Câest une question de survie.
AprĂšs la PremiĂšre Guerre mondiale, au dĂ©but des annĂ©es 1920, la question fut ensuite : allons-nous revenir Ă un Ă©talon-or ? Il y avait bien une paritĂ© dâavant-guerre entre lâargent papier et lâor, mais tous les grands pays, la France, la Belgique, lâItalie, le Royaume-Uni, avaient fait doubler la masse monĂ©taire. Il sâagissait maintenant de revenir Ă lâor. Vous avez deux possibilitĂ©s dans ce cas : soit vous pouvez doubler le prix de lâor, en dâautres termes, amener lâor Ă un nouveau niveau qui correspondra Ă la masse monĂ©taire. Câest ce quâont fait la France, la Belgique, lâItalie et dâautres pays.
Lâautre solution est de diviser par deux la masse monĂ©taire pour revenir Ă lâancien niveau. Câest ce quâa fait le Royaume Uni. Câest Winston Churchill, Ă lâĂ©poque Chancelier de lâEchiquier (le Ministre des finances britannique), qui prit cette dĂ©cision. Une Ă©norme erreur, car cela ne tenait pas compte lâimpact de lâimpression de monnaie.
2. Diviser la masse monĂ©taire par deux est extrĂȘmement dĂ©flationniste, et cette mesure a plongĂ© le Royaume-Uni dans la Grande DĂ©pression bien avant le reste du monde, pour qui elle commença en 1929. Si lâon devait faire face au mĂȘme problĂšme aujourdâhui, il serait important de ne pas rĂ©pĂ©ter les erreurs de 1925.
Alors, quel est le cours Ă fixer pour lâor en cas dâĂ©talon-or ? On peut revenir Ă un Ă©talon-or Ă nâimporte quel prix, mais quel est le bon prix pour Ă©viter la dĂ©flation et la crise ?
Jim Rickards – Le calcul est simple. Les grandes Ă©conomies, la Banque Centrale EuropĂ©enne, la Banque Populaire de Chine, la Banque du Japon et la RĂ©serve FĂ©dĂ©rale amĂ©ricaine, ont créé ensemble 24 milliers de milliards de dollars de masse monĂ©taire (je parle ici de monnaie fiduciaire). Admettons que la couverture par lâor doit dĂ©terminĂ©e Ă 40%. (Ce nâest pas forcĂ©ment nĂ©cessaire : certains affirment que la meilleure solution est de 100%, certaines Ă©conomies ont travaillĂ© avec une couverture Ă hauteur de 20%, mais disons 40% comme base de rĂ©flexion). Historiquement, câest un chiffre qui semble fonctionner. 40% de 24 milliers de milliards de dollars, ce sont 9,6 milliers de milliards de dollars. Il y a dans le monde 33 000 tonnes dâor « officiel », câest-Ă -dire lâor dĂ©tenu par les banques centrales et les fonds souverain, et non lâor que nous dĂ©tenons en tant que particuliers.
Il faut donc diviser 9,6 milliers de milliards par 33 000 tonnes. Un calcul simple, qui aboutit Ă un prix de prĂšs de 10 000 dollars de lâonce. Nous ne sommes pas forcĂ©s de revenir Ă un Ă©talon-or, mais si nous le faisons, il faut fixer le prix Ă environ 10 000 dollars de lâonce pour Ă©viter de refaire lâerreur de 1925 et de plonger le monde dans une crise grave, dans ce cas prĂ©cis, la Grande DĂ©pression.
Les experts en matiĂšre monĂ©taire comprennent ce calcul, qui nâest pas bien compliquĂ©. Mais personne ne souhaite en parler, car les implications sont terribles : lâor vaudrait alors 10 000 dollars de lâonce. Cela veut aussi dire que si les gens perdent confiance dans lâargent-papier en cas de nouvelle crise financiĂšre, et que les Banques Centrales se voient obligĂ©es de revenir Ă un Ă©talon or, le prix fixĂ© serait de 10 000 dollars de lâonce.
3. Quelles seraient les conditions requises pour adopter lâĂ©talon-or ?
Jim Rickards – Jusque-lĂ , toutes mes explications sur la masse monĂ©taire et les stocks dâor dans le monde Ă©taient chiffrĂ©es en dollars. Le dollars US est aujourdâhui la premiĂšre monnaie de rĂ©serve au monde. Environ 60% des rĂ©serves mondiales sont placĂ©es dans des actifs en dollars. Le Japon, TaĂŻwan, la Chine, la NorvĂšge, tous les grands pays (mĂȘme si la France, il est intĂ©ressant de le noter, dĂ©tient une quantitĂ© relativement importante dâor) ont des actifs en dollars. Les Etats-Unis sont la premiĂšre Ă©conomie mondiale, donc les gens rĂ©flĂ©chissent en dollars, mais ce nâest pas une obligation.
Toute monnaie peut adopter son propre Ă©talon Ă condition que le pays dĂ©tienne suffisamment dâor. Câest toute la question : avez-vous suffisamment dâor pour faire face au marchĂ© ? En adoptant un Ă©talon-or, le message que lâon fait passer est « si vous acceptez notre monnaie, nous, en tant que gouvernement, sommes dâaccord pour vous lâĂ©changer contre de lâor Ă taux fixe, et inversement ». Câest ainsi que lâon maintient un Ă©talon-or.
Mais si le prix fixĂ© nâest pas le bon ? Sâil est trop haut, tout le monde va tenter de vous vendre son or et sera ravi dâacheter votre monnaie. Sâil est trop bas, tout le monde va venir vous acheter votre or. Câest ce qui sâest passĂ© aux Etats-Unis au dĂ©but des annĂ©es 1970.
La France, lâEspagne, la Suisse, et quelques autres pays –mais surtout la France –, avaient un excĂ©dent commercial par rapport aux Etats-Unis. La France gagnait beaucoup de dollars, grĂące aux touristes amĂ©ricains, Ă ses exportations etc. et Ă©changeait ensuite ses dollars contre de lâor. A lâĂ©poque, il Ă©tait possible dâacheter de lâor aux Etats-Unis pour 35 dollars de lâonce. Il existait cependant un marchĂ© secondaire privĂ©, oĂč lâon pouvait vendre son or pour 42 dollars de lâonce. Le calcul Ă©tait vite fait : achetez lâor Ă 35 dollars, revendez-le Ă 42, les profits sont garantis.
Il y a donc eu une sorte de ruĂ©e vers lâor de Fort Knox, la base militaire oĂč les Ătats-Unis stockent leur or. Richard Nixon y a mis un terme en 1971 en annulant la convertibilitĂ© des dollars en or par les partenaires commerciaux des Etats-Unis. Sâil ne lâavait pas fait, les Etats-Unis nâauraient plus eu dâor au bout de quelques annĂ©es seulement.
On voit lâimportance de choisir un prix rĂ©aliste pour rĂ©sister sur le marchĂ©. Mais tout pays disposant de suffisamment dâor peut le faire⊠la Chine pourrait revenir Ă un Ă©talon-or, et le yuan chinois vaudrait alors un poids dâor donnĂ©.
Qui sont les plus gros acheteurs dâor aujourdâhui ? La Chine et la Russie. La Chine a achetĂ© environ 4 000 tonnes dâor au cours des six derniĂšres annĂ©es. Personne ne connaĂźt les chiffres exacts, car ils ne sont pas transparents. La Russie, quant Ă elle, a presque fait tripler ses rĂ©serves dâor, passant de 600 tonnes Ă prĂšs de 1 800 tonnes en six ans seulement. En octobre dernier, la Russie a achetĂ© vingt tonnes dâor en un mois seulement.
Quant aux banques nationales europĂ©enne (si vous regardez la zone euro et les 19 ou 20 pays qui en font partie, y compris la France, lâItalie, lâAllemagne et dâautres) leurs rĂ©serves atteignent les 10 000 tonnes dâor. Il nây a pas dâautre monnaie au monde qui soit aussi bien couverte par ses rĂ©serves dâor. On pourrait donc avoir un Ă©talon-or pour lâeuro, le yuan ou le rouble, sans forcĂ©ment attendre le dollar.
Selon moi, cependant, si lâon devait revenir Ă lâĂ©talon-or, cela se ferait par le biais du Fonds MonĂ©taire International. Lui dispose dâune monnaie mondiale dont nous pouvons parler davantage : les Droits de Tirage SpĂ©ciaux, ou DTS. Les DTS pourraient ĂȘtre couverts par de lâor. Ce nâest pas le cas aujourdâhui, ils ne sont pour lâinstant quâune autre forme de monnaie fiduciaire, mais cela pourrait changer. Ce serait une maniĂšre de procĂ©der Ă lâĂ©chelle mondiale.
4. On peut imaginer quâun retour Ă lâĂ©talon-or avec un cours Ă©levĂ© pourrait soulever certains problĂšmes, comme la convoitise accrue des malfaiteurs. Comment sâen protĂ©ger ?
Jim Rickards – Câest une excellente question. La rĂ©ponse est double. Dâune part, le monde a dĂ©jĂ utilisĂ© un Ă©talon-or. De 1870 Ă 1914, un Ă©talon-or a trĂšs bien fonctionné⊠et il nây avait pas de FMI Ă la fin du XIXĂšme siĂšcle ! En rĂ©alitĂ©, entre 1835 et 1913, les Etats-Unis nâavaient mĂȘme pas de Banque Centrale. Pourtant, ce fut une pĂ©riode de forte croissance, avec peu dâinflation et, aprĂšs 1870, un Ă©talon-or trĂšs solide. Bien sĂ»r, la PremiĂšre Guerre mondiale a mis fin Ă tout cela. Ensuite, il nây a pas eu dâĂ©talon-or fonctionnel avant les accords de Bretton-Woods, en 1944, avec un nouveau type dâĂ©talon-or, qui prit fin par Ă©tape entre 1971 et 1973. Il semble que les Ă©talons-or fonctionnent pendant 30, 40 ou 50 ans, puis sâeffondrent.
La question est donc : MĂȘme si nous revenions Ă un nouvel Ă©talon-or, dans quelle mesure pourrions-nous avoir confiance en sa longĂ©vitĂ© ? La rĂ©ponse est simple : achetez de lâor. DĂ©tenez de lâor. Le fait quâun Ă©talon-or existe signifie que le prix de lâor nâaugmentera pas beaucoup une fois quâil sera Ă©tabli. Dans la situation actuelle, le prix de lâor pourrait bondir, et nous pensons quâil le fera : en lâabsence dâun Ă©talon-or, si la population perd confiance dans la monnaie fiduciaire, le prix de lâor en dollar ou en euro augmentera brutalement.
En revenant Ă un Ă©talon-or, on peut Ă nouveau se reposer sur le fait que notre argent vaut plus, mais rien ne nous empĂȘche dâaccumuler des rĂ©serves dâor physique, pour nous couvrir. Ainsi, si le Gouvernement ne tient pas ses promesses, ce nâest pas un problĂšme pour vous : vous avez de lâor physique. Vous aurez peut-ĂȘtre besoin dâen vendre de temps en temps, pour payer vos impĂŽts, vos factures, ou les frais scolaires de vos enfants, que sais-je, mais vous dĂ©tiendrez une partie de votre patrimoine net en or physique.
Pour ce qui est des questions de sĂ©curitĂ© : ne stockez pas votre or Ă la banque. Les moments oĂč vous aurez besoin de votre or coĂŻncident gĂ©nĂ©ralement avec les moments oĂč les banques sont fermĂ©es. En cas de panique financiĂšre, il peut arriver que les autoritĂ©s souhaitent fermer les banques. Câest justement dans ce cas de figure que vous aurez le plus besoin de votre or, mais sâil est Ă la banque, vous vous casserez le nez sur la porte.
Reste quâil faut mettre votre or en sĂ©curitĂ© : les entreprises privĂ©es sont les mieux placĂ©es. Tout est question de rĂ©putation. Dans la prĂ©cĂ©dente intervention, Yannick Colleu a parlĂ© dâor contrefait et dâautres dangers du mĂȘme type. Ce sont des problĂšmes bien rĂ©els, mais la solution Ă toutes ces questions de stockage, dâauthenticitĂ© etc. est de traiter uniquement avec des institutions de renom. Vous devez connaĂźtre lâhistoire, lâorigine et la rĂ©putation des personnes Ă qui vous vous adressez.
5. LâEtat lui-mĂȘme ne risque-t-il pas dâĂȘtre tentĂ© de confisquer lâor des particuliers ?
Jim Rickards – Tout dâabord, il faut admettre que câest un risque, on ne peut pas lâexclure ni affirmer que cela nâarrivera pas. Si le risque zĂ©ro nâexiste pas, il y a plusieurs types de risques, et lâimportant est dâĂȘtre conscient de ceux que lâon prend. Si lâon ne dĂ©tient pas dâor, on court le risque que notre argent papier perde toute sa valeur. Si lâon en a, on court un risque diffĂ©rent, celui quâil puisse ĂȘtre confisquĂ©.
Il sâagit alors dâĂ©valuer le risque. Le cas le plus cĂ©lĂšbre que je connaisse sâest produit en 1933 : Le PrĂ©sident des Ătats-Unis, Franklin Delano Roosevelt, a alors fait passer un ordre exĂ©cutif, câest-Ă -dire quâil a donnĂ© lâordre Ă tous les citoyens, sans passer par un vote du CongrĂšs, de remettre leur or, sous peine de poursuites criminelles. Refuser de remettre son or, sâĂ©tait sâexposer Ă cinq ans de prison ou Ă une amende de 100 000 dollars, ce qui Ă©quivaut Ă un million de dollars aujourdâhui : câest une somme Ă©norme.
Toute la question est de savoir si votre sociĂ©tĂ© respecte lâĂtat de Droit. Ce quâa fait Roosevelt est intĂ©ressant. La Constitution des Ătats-Unis comporte le CinquiĂšme Amendement, qui contient plusieurs paragraphes, dont lâun spĂ©cifie que lâĂtat ne peut pas prendre votre propriĂ©tĂ© sans vous offrir une « juste indemnitĂ© », ce sont les termes exacts. Alors comment Roosevelt sây est-il pris pour voler, pour ainsi dire, lâor des citoyens amĂ©ricains ?
A lâĂ©poque, les Etats-Unis avaient un Ă©talon-or, et lâor valait environ 20 dollars de lâonce. Lorsque vous rapportiez votre mĂ©tal jaune, le gouvernement vous donnait donc 20 dollars de lâonce en Ă©change. Il sâagissait bien sĂ»r dâargent papier, que le gouvernement imprimait lui-mĂȘme, mais il vous Ă©tait dĂ». Câest ainsi quâils ont rĂ©glĂ© le problĂšme de constitutionnalitĂ©. Mais Roosevelt avait un secret : il avait lâintention secrĂšte de faire augmenter le prix de lâor. Six mois plus tard, le prix de lâor Ă©tait de 35 dollars de lâonce.
Le calcul est simple : ordonner dâabord aux citoyens de rendre leur or en Ă©change de 20 dollars de lâonce, et faire ensuite augmenter le prix jusquâĂ 35 dollars de lâonce. Tout cela dans le cadre dâun plan. Roosevelt a pour ainsi dire sciemment volĂ© 15 dollars de lâonce aux citoyens amĂ©ricains. Je parle ici de confiscation, parce que le processus Ă©tait trĂšs malhonnĂȘte. Il savait pertinemment quâil allait faire augmenter le prix. Sâil lâavait fait dâabord, et avait rachetĂ© lâor pour 35 dollars, les bĂ©nĂ©fices seraient revenus aux citoyens amĂ©ricains au lieu du TrĂ©sor. VoilĂ comment Roosevelt a contournĂ© la loi : en offrant une indemnitĂ© de 20 dollars de lâonce, et en volant les 15 dollars supplĂ©mentaires.
Aujourdâhui, il nây a pas dâĂ©talon-or. Pas de taux fixe auquel le gouvernement puisse vous confisquer votre or. Selon la loi, le gouvernement devrait donc vous payer le prix fixĂ© par le marchĂ© : câest ainsi quâun juge dĂ©finirait aujourdâhui une « juste indemnitĂ©. »
Dans quel monde le gouvernement serait-il susceptible de vous confisquer votre or ? Pas Ă lâheure actuelle, pas sur un marchĂ© normal, pas une journĂ©e tranquille⊠mais en cas de panique. Une situation oĂč un gouvernement, dans un Etat de Droit, en vient Ă confisquer de lâor est une situation dĂ©sespĂ©rĂ©e, oĂč lâon a dĂ©jĂ commencĂ© Ă paniquer. Sâil nây a pas dâĂ©talon-or, dans ce genre de situation, le cours de lâor explose.
Aux Etats-Unis, le Gouvernement pourrait vous confisquer votre or, mais il devrait alors vous payer une « juste indemnitĂ© », qui pourrait valoir Ă 5⊠6 fois le prix de lâor actuel⊠voire mĂȘme 10 000 dollars de lâonce, Ă©tant donnĂ© que cela ne peut se produire que si la panique a dĂ©jĂ commencĂ©. Pourquoi, sinon, payer aussi cher ? Si lâon applique ce mĂȘme principe dans le monde entier, la question est : votre sociĂ©tĂ©, respecte-t-elle lâEtat de Droit.
Je ne suis pas un expert en droit constitutionnel français, mais je pense pouvoir avancer que la Constitution française a le mĂȘme type de protection que la constitution amĂ©ricaine, et prĂ©voit que le Gouvernement, sâil peut saisir votre propriĂ©tĂ©, doit vous donner en Ă©change une juste indemnitĂ©. La saisie est une possibilitĂ©, mais vous obtiendriez compensation, vous feriez un profit. Le Gouvernement achĂšterait votre or au prix le plus Ă©levĂ©, et non le plus faible.
Dans un pays qui ne respecte pas lâEtat de Droit (le Venezuela, la CorĂ©e du Nord, certains pays dâAfrique, comme le Congo etc.) il nây a aucune garantie. Si vous y habitez, nây stockez pas votre or. ThĂ©oriquement, mieux vaut ne pas trop sâĂ©loigner physiquement de son or, et lâavoir Ă proximitĂ© de son lieu dâhabitation. Mais si vous habitez au Venezuela ou au Congo, dans ce cas, mieux vaut le stocker en Suisse, qui est pour moi, la juridiction la plus sĂ»re au monde. Du point de vue de lâEtat de Droit, les Etats-Unis sont plutĂŽt sĂ»rs eux aussi, et je pense que la France lâest Ă©galement.
En bref : le Gouvernement peut confisquer votre or, mais il devrait alors vous verser une juste indemnité, et dans un monde sans étalon-or, cette juste indemnité représentera une vraie fortune.
6. Pensez-vous quâavec les volontĂ©s politiques et financiĂšres actuelles, un retour Ă lâĂ©talon-or soit envisageable ?
Jim Rickards – Est-il possible que cela se produise ? Je pense que oui, Ă condition, comme nous lâavons dit lors de la premiĂšre question, que le prix fixĂ© soit le bon, pour Ă©viter une dĂ©pression, soit 10 000 dollars de lâonce. Vous vous souvenez encore de mon calcul simple, qui consistait Ă diviser la masse monĂ©taire par la quantitĂ© dâor. Logiquement, si lâon augmente la masse monĂ©taire, le prix de lâor doit augmenter lui aussi. Dans un an, je vous dirai peut-ĂȘtre que le prix idĂ©al serait de 11 000 dollars de lâonce ou plus, car on ne cesse dâimprimer plus dâargent.
Sans Ă©talon or, le prix non-dĂ©flationniste ne cesse dâaugmenter Ă mesure que le Gouvernement imprime de nouveaux billets. Câest le premier impĂ©ratif : fixer le bon prix⊠une fois cette question rĂ©solue, ce nâest techniquement pas difficile : le monde a adoptĂ© plusieurs Ă©talon-or au cours des 130 derniĂšres annĂ©es, câest tout Ă fait faisable.
La question est : existe-t-il une banque centrale au monde qui souhaite revenir Ă un Ă©talon-or. La rĂ©ponse est clairement non : lâalternative, câest lâargent papier car ce sont elles qui le contrĂŽlent. Qui accepterait de renoncer volontairement Ă son pouvoir ? Aucune agence, aucune banque centrale, ni aucune branche du Gouvernement. En contrĂŽlant lâargent on contrĂŽle la politique, lâĂ©conomie, le bien-ĂȘtre des individus⊠on contrĂŽle indirectement le monde : un gouvernement ne peut pas mener dâaction militaire Ă grande Ă©chelle sans accĂšs Ă du financement. Jamais les Banques centrales nâaccepteraient volontairement de renoncer Ă ce pouvoir.
Mais les banques centrales pourraient-elles ĂȘtre obligĂ©es dâabandonner ce pouvoir contre leur volontĂ© ? Peut-on imaginer une pĂ©riode oĂč la confiance dans lâargent papier serait si gravement Ă©branlĂ©e que les gens dĂ©cideraient de revenir dâeux-mĂȘmes Ă un Ă©talon-or, en achetant du mĂ©tal jaune ? Que les Banques centrales doivent revenir Ă un Ă©talon-or pas parce quâelles le souhaitent, mais parce quâelles y sont obligĂ©es pour rĂ©tablir la confiance ?
De mon point de vue, câest une possibilitĂ© tout Ă fait rĂ©elle, et je pense que ce jour viendra plutĂŽt Ă court terme quâĂ long terme. Les Banques centrales seront alors obligĂ©es de revenir Ă un Ă©talon-or parce que cette mesure sera nĂ©cessaire pour prĂ©server la confiance dans lâargent papier, et le systĂšme monĂ©taire.
7. Chez AuCOFFRE, nous pensons que lâor devrait plutĂŽt ĂȘtre une monnaie complĂ©mentaire âopen sourceâ, en dehors des Etats, pour supplĂ©er aux manques des monnaies actuelles, sans pour autant les remplacer. Bref, quâune monnaie complĂ©mentaire-or gĂ©rĂ©e par ses utilisateurs soit créée, Ă lâinstar du bitcoin, et que le mĂ©tal prĂ©cieux reprenne la place quâil a perdu depuis presque 100 ans. Aujourdâhui des systĂšme dĂ©centralisĂ©s comme la blockchain le permettraient et Ă©viteraient ainsi les manipulations de cours et de stocks des banques ou des Etats. Quâen pensez-vous ?
Jim Rickards – Je pense en effet que câest possible ; je pense mĂȘme que câest en train de se produire.
AuCOFFRE fait partie de cette mĂ©canique, tout comme dâautres prestataires de services. Il y en a un certain nombre dans le monde entier. En ce moment, on voit notamment arriver des cartes de paiement de tous types, MasterCard, Visa, disponibles dans nâimporte quel Ă©tablissement, associĂ©es Ă un compte quâil faut remplir avec de lâor. Admettons que vous envoyiez au prestataire 50 000 euros pour ouvrir un compte. Lui prend ces 50 000 euros et les utilise pour acheter de lâor au prix du marchĂ©. Il met cet or, de lâor physique bien rĂ©el, dans un coffre, et celui-ci est allouĂ© Ă votre compte.
Avec cette carte de paiement, vous pouvez voyager, dormir Ă lâhĂŽtel, aller au restaurant ou faire du shopping, et le prestataire convertit vos dĂ©penses en monnaies locales en or, aux prix du marchĂ©, et fait diminuer la quantitĂ© dâor qui se trouve sur votre compte.
Au final, vous dĂ©pensez votre or : vous ĂȘtes revenu Ă votre propre Ă©talon-or. Vous avez un pouvoir dâachat, mais celui-ci est couvert par de lâor, donc si la valeur de lâargent papier sâeffondre, ce nâest pas un problĂšme pour vous, Ă©tant donnĂ© que dans ce cas de figure, la valeur de votre or, en argent papier, augmente Ă©normĂ©ment. Vous pouvez stocker davantage dâor sur votre compte : si vous dĂ©pensez la totalitĂ© des 50 000 âŹ, vous pouvez le rĂ©alimenter.
Il y a aussi des cryptomonnaies, comme le Bitcoin (câest la plus cĂ©lĂšbre, mĂȘme sâil y en a dâautres), ou les comptes PayPal, qui peuvent toutes ĂȘtre liĂ©es Ă lâor de diverses maniĂšres. Vous nâĂȘtes pas obligĂ© dâattendre que le monde revienne Ă un Ă©talon-or. Jâutilise un Ă©talon-or, jâachĂšte de lâor physique. Je suis AmĂ©ricain, donc jâachĂšte des Gold Eagles, câest ma forme de piĂšces dâor prĂ©fĂ©rĂ©e, mais vous pouvez acheter des barres, des NapolĂ©ons, nâimporte quel type de piĂšce de bonne rĂ©putation. Vous revenez ainsi Ă votre propre Ă©talon-or.
Je vous recommande dâinvestir 10% de vos fonds disponibles dans de lâor physique. Je pense quây investir 50 ou 100% de vos actifs manque de prudence, mieux vaut diversifier. 10% suffisent Ă protĂ©ger le reste de votre portefeuille en cas dâĂ©vĂšnement extrĂȘme, mais si rien ne se passe avec lâor, lâimpact sur vos investissements restera minime. Cet or doit impĂ©rativement ĂȘtre de lâor physique. Dans les faits, vous revenez ainsi Ă votre propre Ă©talon-or.
Donc oui, je pense que câest faisable. Les Banques centrales pourraient bien se rĂ©veiller un beau jour et se rendre compte que les gens se sont tournĂ©s en masse vers des cryptomonnaies alternatives, vers des cartes de paiement adossĂ©es Ă de lâor, vers des piĂšces dâargent, aussi, qui sont une bonne alternative⊠que les gens, en somme, sont revenus Ă un Ă©talon-or « open source » indĂ©pendant des Banques centrales.
8. Pensez-vous que les prĂ©sidentielles amĂ©ricaines puissent avoir un rĂŽle sur le cours de lâor en fonction du candidat Ă©lu ?
Jim Rickards – Je pense que la rĂ©ponse est oui. Donald Trump est un personnage Ă lâhumeur trĂšs changeante ; il change dâavis sans cesse, il est trĂšs imprĂ©visible. Jâai Ă©tĂ© en mesure de prĂ©voir son Ă©lection, mais je ne peux pas prĂ©voir ce quâil va dire Ă lâavenir, sur aucun sujet. Cela mis Ă part, le prix de lâor en dollars aux Etats-Unis est actuellement en train de baisser.
Lâexplication est simple : câest liĂ© au fait que lâon sâattend Ă ce que les taux dâintĂ©rĂȘts augmentent aux Etats-Unis. Cette augmentation est synonyme dâun dollar plus fort : lâargent du monde entier, notamment en provenance des pays Ă©mergents, investi en Turquie, en IndonĂ©sie ou au BrĂ©sil, ou Ă Singapour, en Malaisie etc. sort aujourdâhui de ces marchĂ©s pour revenir aux Etats-Unis et ĂȘtre investi dans des actifs en dollars.
Câest la consĂ©quence de lâaugmentation attendue des taux dâintĂ©rĂȘts : lâargent va lĂ oĂč les retours sur investissements sont les plus Ă©levĂ©s. Le prix de lâor en dollars est inversement proportionnel Ă lâĂ©tat du dollar : avec un dollar fort, le cours de lâor en dollars chute, et inversement.
Si lâon considĂšre lâor comme une monnaie, ce qui est mon cas, on peut considĂ©rer cela comme un taux de change normal, comme entre lâeuro et le dollar par exemple. Aujourdâhui, un euro vaut environ 1,05 dollars. Un Français qui part aux Etats-Unis achĂštera des dollars, un AmĂ©ricain qui vient en Europe, comme moi hier, achĂštera des euros. On connaĂźt le taux de change. Lâor nâest quâune forme de monnaie diffĂ©rente. Le « taux de change » entre lâor et le dollar nâest pas diffĂ©rent du taux de change entre lâeuro et le dollar. Quand le dollar est fort, lâeuro sâaffaiblit, si le dollar est faible, lâeuro se renforce. La mĂȘme chose est valable pour lâor.
Actuellement, le dollar est trĂšs fort car on sâattend Ă une augmentation des taux dâintĂ©rĂȘt. Tout cela est indĂ©pendant de Trump, et resterait vrai si Hillary Clinton avait gagnĂ© lâĂ©lection : la Fed a lâintention dâaugmenter les taux dâintĂ©rĂȘt dĂšs que possible, et ce quel que soit lâĂ©tat du monde.
Le dollar va-t-il rester fort ? Selon moi, câest impossible.
Jim Rickards – Le dollar est aujourdâhui plus fort que jamais au cours des dix derniĂšres annĂ©es. La RĂ©serve FĂ©dĂ©rale a un objectif dâinflation Ă 2%. Elle tente de lâatteindre depuis six ans, en vain. Or, un dollar fort est dĂ©flationniste. Les Etats-Unis ont un dĂ©ficit commercial net : nous achetons plus de choses au reste du monde que nous en exportons. Dans ce genre de cas, si le dollar est fort, le coĂ»t des marchandises Ă©trangĂšres diminue : un dollar nous permet dâacheter plus de vin français, de vacances en Suisse, de textile chinois, dâĂ©lectronique japonaise, de voitures allemandes⊠Câest donc dĂ©flationniste.
Comment faire coĂŻncider lâobjectif dâinflation de la Fed, quâelle ne parvient pas Ă atteindre, et un dollar fort â donc dĂ©flationniste ? Ce nâest pas possible. Les choses doivent changer. Un dollar fort fera ralentir lâĂ©conomie amĂ©ricaine, alors mĂȘme quâelle est dĂ©jĂ relativement affaiblie.
Actuellement, la Bourse amĂ©ricaine connaĂźt une sorte dâeuphorie suite Ă lâĂ©lection de Donald Trump. Pendant lâĂ©lection, les gens Ă©taient si repoussĂ©s par la personnalitĂ© de Trump que peu dâentre eux se sont penchĂ©s sur son programme. Maintenant quâil est Ă©lu, on se rend compte quâil sâagit de baisser les impĂŽts et le niveau de rĂ©glementation et de dĂ©penser plus. Champagne !
Les cours des entreprises pharmaceutiques augmentent car il veut mettre fin Ă Obama-Care ; ceux de la DĂ©fense augmentent car il veut investir dâavantage dans lâarmĂ©e, le prix des banques Ă©galement car il veut mettre un terme Ă la rĂ©glementation Dodd-Franck ; les entreprises du BTP comme Caterpillar et John Deere augmentent car il veut investir dans les autoroutes et les ponts⊠tout augmente. VoilĂ pour la Bourse. Et la Fed veut augmenter les taux dâintĂ©rĂȘts, ce qui renforce le dollar. Avec un dollar fort et un marchĂ© boursier en pleine forme, lâor connaĂźt une pĂ©riode difficile.
Mais il y a un problĂšme dâarithmĂ©tique. Si lâon baisse les impĂŽts mais que lâon dĂ©pense un millier de milliards de dollars dans les infrastructures, ce dont Trump a parlĂ©, on ajoute plus dâun millier de milliards de dollars Ă la dette amĂ©ricaine, or notre dette sâĂ©lĂšve dĂ©jĂ Ă 20 milliers de milliards de dollars que nous ne pouvons pas rembourser. Le rapport dette/PIB est dâenviron 104%. Si lâon rajoute 1 millier de milliards de dollars de dette, ce rapport atteint 110%, et les Etats-Unis commencent Ă ressembler Ă©trangement Ă la GrĂšce.
Nous sommes Ă la veille dâune crise de la dette souveraine aux Etats-Unis, avec un effondrement du dollar, une panique.
Soit la Fed accepte que lâon dĂ©pense cet argent, et dit « trĂšs bien, nous allons donc imprimer dâavantage de dollars » (ce qui est extrĂȘmement inflationniste, et ferait augmenter le prix de lâor), soit nous allons connaitre une panique financiĂšre qui fera elle aussi augmenter le cours de lâor car, en cas de panique, on se tourne vers la qualitĂ©. Deux scĂ©narios diffĂ©rents, mais qui font tous deux augmenter le cours de lâor en dollars.
Les politiques de Trump sont intĂ©ressantes, mais il sera victime, ou en tous cas sujet Ă des facteurs plus importants, comme le rapport dette/PIB. Une remarque rapide Ă ce sujet : lâune des conseillĂšres de Trump est le Pr. Judy Shelton. Elle nâest pas trĂšs connue dans le monde, elle est Ă peine connue aux Etats-Unis, mais elle a dĂ©jĂ travaillĂ© avec lâadministration Reagan, a Ă©crit un certain nombre de livres et dĂ©fend bec et ongles un retour Ă lâĂ©talon-or. Cela ne veut pas dire que les Etats-Unis vont y revenir demain, mais lâun des membres du cercle proche de Trump dĂ©fend cette idĂ©e avec enthousiasme, et je garderai un Ćil sur la situation.
9. Le candidat a-t-il une influence sur les décisions de la FED ?
Jim Rickards – Bonne question ! Jâaurais bien du mal Ă vous rĂ©pondre. Ce que je peux dire câest que lâidĂ©e que la Fed est indĂ©pendante et apolitique est ridicule. La Fed est trĂšs politisĂ©e. Jamais ils ne lâadmettront : ils affirment le contraire haut et fort, mais câest faux, cela fait partie de la propagande gouvernementale. Il y a de trĂšs nombreux exemples.
Lâun des meilleurs date des annĂ©es 1970, sous Richard Nixon, quand le PrĂ©sident de la Fed Ă©tait Arthur Burns. Il a intentionnellement maintenu des taux dâintĂ©rĂȘts bas et fait augmenter la masse monĂ©taire pour garantir la réélection de Nixon en 1972. RĂ©sultat ? Une hyperinflation et une multiplication par quatre des prix du pĂ©trole. Tout le monde affirmait Ă lâĂ©poque que câĂ©tait liĂ© aux guerres au Moyen-Orient. En vĂ©ritĂ©, les Arabes se sont tournĂ©s vers les Etats-Unis et ont dit : vous faites diminuer la valeur du dollar, nous allons donc faire augmenter les prix du pĂ©trole. De 1977 Ă 1981, lâinflation aux Etats-Unis Ă©tait de 50%. 50% ! Le dollar a perdu la moitiĂ© de sa valeur en cinq ans, entre 1977 et 1981. Câest un exemple cĂ©lĂšbre.
Plus rĂ©cemment, le 02 novembre, peu avant lâĂ©lection, la Fed a tenu une rĂ©union. Il a Ă©tĂ© dĂ©cidĂ© de ne pas augmenter les taux dâintĂ©rĂȘt. Elle aurait pu le faire â elle aurait sans doute dĂ» le faire, en tout cas, elle affirme vouloir le faire et toutes les conditions sont en place. Alors pourquoi nâa-t-elle rien fait ? Pour ne pas ĂȘtre accusĂ©s de manipuler lâĂ©lection. Une augmentation des taux dâintĂ©rĂȘt aurait provoquĂ© un krach boursier, qui aurait pu jouer en faveur dâHillary Clinton plutĂŽt que de Donald Trump. La Fed nâa pas saisi cette occasion, et ce pour des raisons politiques. Câest une institution trĂšs politisĂ©e.
Le PrĂ©sident peut-il influencer les dĂ©cisions de la Fed ? Pas directement. Il ne peut pas appeler Janet Yellen demain et lui dire : je veux que vous augmentiez les taux dâintĂ©rĂȘt, ou que vous les abaissiez. Ce ne serait pas acceptable. Mais il sĂ©lectionne les membres du Conseil des gouverneurs. Il y a sept siĂšges au Conseil, et deux sont aujourdâhui inoccupĂ©s : il nây a aujourdâhui que cinq membres, en comptant la PrĂ©sidente, Janet Yellen.
AprĂšs avoir prĂȘtĂ© serment en Janvier, le PrĂ©sident Trump pourra remplir ces deux siĂšges, des postes extrĂȘmement importants : nous verrons qui il choisira. Sâil se tourne vers des personnes qui croient en un dollar fort et en une augmentation des taux dâintĂ©rĂȘts, cela pourrait ĂȘtre une mauvaise nouvelle pour lâor Ă court terme, mais trĂšs positif Ă long terme, dans la mesure oĂč cela provoquera sans doute une rĂ©cession aux Etats-Unis.
Par contre, sâil choisit des personnes plus souples, du genre Ă jeter des billets par milliers depuis un hĂ©licoptĂšre⊠Les Etats-Unis sâendettent, le Gouvernement finance sa dette en Ă©mettant des Bons du TrĂ©sor que la Fed achĂšte avec de lâargent fraĂźchement imprimĂ©. Elle les ajoute Ă son bilan et ne les vend jamais. VoilĂ Ă quoi cela correspond. Sâil choisit ce genre de profil, et que lâon finance un programme dâun millier de milliards de dollars dâinvestissement dans les infrastructures, je peux vous garantir une inflation.
Il ne peut pas licencier Janet Yellen. Il en a parlĂ© mais nâen a pas lĂ©galement le pouvoir. Mais son mandat sâachĂšve en Janvier 2018. Il ne lui reste que 13 Ă 14 mois, suite Ă quoi Trump pourra nommer un nouveau prĂ©sident. Il nommera deux nouveaux gouverneurs en janvier, lâun dâeux pourrait ĂȘtre un prĂ©sident « en attente », qui mettra Janet Yellen sous pression. Câest un jeu dâĂ©chec trĂšs politique, et je mâintĂ©resse de trĂšs prĂšs Ă ces deux postes. Le nom de Kevin Warsh circule, il a dĂ©jĂ siĂ©gĂ© au conseil, ou encore celui de Chris Whalen, un Ă©conomiste amĂ©ricain trĂšs connu⊠Nous verrons qui il choisira, mais câest en tous cas une dĂ©cision clĂ©.
En partenariat avec Publications Agora
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