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La liquidation du géant chinois de l’immobilier Evergrande a été prononcée par un tribunal de Hongkong à la fin du mois de janvier 2024. Nouvelle étape dans cette crise immobilière qui secoue la Chine depuis plus de 3 ans.  Les Chinois investissaient leurs économies et bien plus avec des lignes de crédit accordées très facilement par les promoteurs et les banques dans le « béton ». Jusqu’au jour où la machine s’est enrayée. Explications.

Les points clés de cet article

  • La faillite d’Evergrande est un signal très négatif pour l’économie chinoise. L’immobilier représente 25 % du PIB.
  • Les actifs du géant de l’immobilier sont à 90 % en Chine : les liquidateurs de Hong-Kong auront du mal à les récupérer,
  • C’est l’épargne des Chinois qui est en jeu avec les difficultés de l’immobilier dans l’Empire du Milieu.

Evergrande : grosse dette, grosse chute !

Les chiffres sont impressionnants. La dette du géant Evergrande donne autant le vertige qu’une visite du roof top d’une de leurs tours à Pékin : 300 milliards de dollars !

Le gouvernement chinois veut sauver son immobilier

Les autorités chinoises venaient d’annoncer un plan de 280 milliards pour soutenir l’immobilier dans l’Empire du Milieu. Au même moment, un tribunal de Hongkong décide de siffler la fin de la récréation. Le juge s’exclamera même : « trop c’est trop ! » après avoir patienté de longs mois que les dirigeants d’Evergrande proposent un plan de restructuration de la dette. Alors la liquidation du groupe Evergrande est prononcée.

Evergrande un grand de l’immobilier… en Chine

Les avoirs de l’entreprise, en dehors de la Chine, peuvent être gelés. « En dehors de la Chine », cette précision a son importance puisque 90 % des actifs d’Evergrande sont justement en Chine. Et là, pour les récupérer, c’est une autre histoire.

Immobilier en Chine : une crise majeure

Après plus de deux décennies de croissance fulgurante, l’immobilier représente 25 % du PIB chinois. Aujourd’hui c’est tout un modèle basé sur le crédit et le VEFA (achat sur plan) qui s’effondre. Rien qu’en 2019, 18 millions de logements neufs ont été construits. Une industrie qui concerne tout le monde dans ce pays. On compte 95 000 promoteurs dans le pays et des millions d’emplois.

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La source de revenus principale des collectivités territoriales

En Chine, le terrain appartient à l’Etat et donc localement aux collectivités locales. Avec le boom de l’immobilier à partir de l’an 2000, les maires ont pu financer leurs politiques locales en vendant des terrains aux promoteurs.

Des banques qui suivent les injonctions gouvernementales

Dans ce pays, les banques sont des banques d’Etat. Et elles doivent mettre en application les directives du gouvernement. L’immobilier est la variable d’ajustement des dirigeants chinois. Si la croissance faiblit, les banques sont sommées de prêter à taux très faible aux promoteurs et aux acheteurs, illustration très concrète de la célèbre phrase : « quand le bâtiment va, tout va ! ».  Le risque a ainsi été multiplié par deux entre 2005 et 2021. Aujourd’hui, l’encours des emprunts immo représente 27 % des crédits des banques chinoises.

L’immobilier, placement préféré de l’épargnant

Pour la population chinoise, l’achat d’un appartement a longtemps été un placement patrimonial. L’immobilier, comme l’or, est une épargne de précaution. Profitant d’un accès facile au crédit, de nombreux citoyens ont pu acheter et mettre en location plusieurs appartements ou maisons. Et jusqu’à l’arrivée du COVID, les prix étaient plutôt en hausse. Un investissement de moyen long terme plutôt fiable donc.

Le spectre d’un krach immobilier

La crise chinoise n’a rien avoir avec les subprimes. Il ne s’agit pas une financiarisation, d’une titrisation des créances immobilières. Ici pas d’actifs pourris qui font tomber tout l’édifice. Non, c’est plus basique que ça : une histoire d’offre et de demande qui ne matchent plus.

Une démographie en berne

Si la bulle a pu se constituer, c’est qu’en 2000, avec le développement économique, avec le transfert des populations rurales vers les usines et les villes, il fallait absolument construire des logements. Dans le même temps, la population s’est enrichie : elle avait donc besoin d’épargner. On l’a vu, pour un Chinois, l’épargne c’est la pierre (et l’or). Cela a logiquement généré de la demande, et le crédit a pu pousser l’offre des promoteurs. Sauf, que le pic de population ayant été atteint, la demande de logements pour la location a baissé. L’offre est toujours présente, mais la demande l’est moins ! C’est ainsi qu’on a vu ces spectacles d’immeubles vides, détruits pour éviter les coûts de maintenance.

Un COVID qui stoppe la croissance

Même si la Chine est toujours en croissance, il faut bien noter que les confinements drastiques à répétition ont freiné le développement du pays. Les Chinois qui ne veulent pas investir pour épargner, mais pour se loger. Et là, le système de commercialisation des appartements n’est plus adapté comme on va le voir.

Le siège d’Evergrande, 2ème promoteur immobilier chinois.

L’Etat serre la vis du crédit

Si le gouvernement peut pousser les feux, il peut aussi couper le robinet. Quand les autorités chinoises ont constaté le taux d’endettement des promoteurs immobiliers, notamment lors de l’alerte d’Evergrande (deuxième promoteur du pays qui enregistrait 291 milliards d’euros de dettes), ils ont réduit drastiquement l’accès au crédit.

Les acheteurs lésés

Les acheteurs se sont retrouvés en difficulté. En effet, la plupart des programmes immobiliers sont vendus sur plans (ou en VEFA). Les promoteurs sans accès au crédit n’ont pas pu achever leurs immeubles. Les propriétaires ne peuvent pas les louer (ou les habiter), ils remboursent des traites sans bénéficier des revenus du bien (ou avec un loyer à payer quand même). Les défaillances se sont multipliées tout comme les manifestations. Et dans le même temps les prix baissent. Sur huit mois en 2022, les ventes ont baissé de 30 %.

L’immobilier en Chine va-t-il faire tomber le géant aux pieds d’argile ?

Il y a peu de chance que cela arrive. En effet, la force (et la faiblesse) de cette économie c’est d’être dirigiste. Donc, le gouvernement chinois évitera les faillites des uns et des autres. Même si cela doit passer par des destructions d’immeubles pour réduire l’offre. Ensuite, les collectivités locales et les banques devront mettre en place des mesures pour éviter les faillites des uns et des autres. En revanche, il n’est pas certain que l’épargnant conserve une même passion pour l’immobilier. Une opportunité pour l’or ?

A lire : le dossier publié par la direction du Trésor français sur l’immobilier en Chine.

Le lien de téléchargement vers l’étude complète.

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Benjamin Rosoor
Je suis entrepreneur sur le web depuis 1999. Diplômé de l'école de journalisme de Bordeaux, j'ai tout d'abord été journaliste-reporter radio pendant 10 ans. J'anime plusieurs médias sociaux et blogs sur les entreprises, la tech, la finance, le marketing digital.

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