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Quand le bâtiment va, tout va ! Alors quand l’immobilier est en crise, est-ce la crise pour tout le monde ? Entre taux d’intérêt, baisse des prix ou bien encore réduction du nombre de permis de construire, c’est un déluge de chiffres qui s’abat sur les investisseurs dans la pierre. Tentative de retrouver un peu de clarté dans ce secteur dans la tourmente avec Olivier Berruyer. Rédacteur en chef du média Élucid, il est spécialiste de la donnée économique et démographique.

Comment expliquer cette baisse des prix de l’immobilier ?

Olivier Berruyer : Les prix de l’immobilier vont mal, la construction immobilière va mal en conséquence. Les prix ont commencé une baisse de 2 à 3 % par trimestre. Ce qui, pour des biens importants (à Paris et en région parisienne notamment), commence à faire de belles sommes. Cette baisse va sans doute se poursuivre un moment parce qu’en fait, on est en train d’effacer les effets « délirants » des taux d’intérêt à 0 %. Il faut quand même se rendre compte qu’on est dans un triplement des prix à Paris par rapport à ce qui existait dans les années 90 !

Pourtant, il y avait des acheteurs à ces prix très élevés

Olivier Berruyer : Le problème de l’immobilier c’est que souvent c’est un investissement mais aussi c’est l’endroit où l’on vit. On vit dans « une somme d’argent » mais qui n’est pas liquide : on ne peut pas s’en servir. C’est donc assez ambigu. D’un côté l’investisseur se dit : tant mieux si les prix montent ! Et de l’autre, pour celui qui doit vivre dedans, c’est finalement moins sympa.

Il s’agit donc d’un problème de taux ?

On en est là à cause de la baisse historique des taux. Plus le temps a passé, moins le crédit a coûté, si bien que cela a augmenté la possibilité de payer les appartements plus chers.

Les taux d’intérêt sont au cœur du problème visiblement

Olivier Berruyer : C’est la puissance des mécanismes des taux d’intérêt qui est au cœur du problème. Quand les taux sont passés de 6 à 1 % entre les années 90 et jusqu’à 2021, on se dit que ce n’est pas beaucoup mais en fait, cela donne une capacité d’endettement qui n’est pas loin de doubler. Après la baisse des taux, les banquiers ont allongé la durée des crédits, toujours pour permettre aux gens d’acheter… alors que les prix montaient. Aujourd’hui, la moitié des crédits sont souscrits sur 25 ans. En revanche, les revenus ne changent pas beaucoup, si bien que la capacité d’emprunt, c’est-à-dire 30 % de ses revenus, ne bouge pas. Il fallait changer le coût de l’emprunt (intérêts et durée).

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Mais la hausse est pour tout le monde ?

Olivier Berruyer : Effectivement, à part les primo accédants, tous les autres ont un apport personnel, fruit de la vente de leur logement précédent, qui augmente. Mais comme tous les vendeurs augmentent les prix, la capacité d’achat ne change finalement pas. Les perdants, ce sont ceux qui n’ont pas d’apport ou qui vendent mal leur bien (divorce, mobilité, décès).

Et quand les taux remontent comme en ce moment ?

Olivier Berruyer : Tout d’abord à 4 ou 5 %, les taux d’intérêt sont à un niveau normal. Normal si l’inflation est à 2 %. La « propagande » des acteurs de l’immobilier qui hurlent pour demander une baisse des taux est incroyable. L’inflation est toujours à 7 %, nous sommes donc à taux réels négatifs. Ce qui change en fait, c’est la capacité d’emprunt qui diminue. Vous payez plus d’intérêts : sauf à pouvoir augmenter vos mensualités, vous remboursez moins de capital. Par exemple, vous avez la capacité d’emprunter 300 000 euros à 1 %, à 5 %, vous n’emprunterez que 200 000 euros. 1/3 de capacité à acheter en moins, c’est colossal. Cela explique la baisse des achats (et des ventes).

Vous pensez que les prix de l’immobilier vont poursuivre leur baisse ?

Olivier Berruyer : La baisse des prix en ce moment, c’est une correction très légère. Elle va se poursuivre. C’est normal : historiquement, les prix sont toujours deux fois trop élevés par rapport aux revenus des ménages. La baisse réelle peut être assez importante. Les prix n’ont pas augmenté dans un contexte inflationniste avec 7 % donc, cela fait déjà -7 % en valeur réelle. Si vous ajoutez les baisses de prix jusqu’à 10 % dans certaines villes, vous êtes déjà à -17 % de baisse de valeur d’un bien immobilier.

Mais un achat immobilier, c’est aussi du patrimoine, de l’épargne

Olivier Berruyer : Oui c’est une épargne forcée, pendant 25 ans. Le temps de rembourser le crédit. À la fin, effectivement vous avez un bien qui représente une certaine somme mais qui n’est pas liquide du tout puisque vous vivez dedans. Bien évidemment, vous pouvez faire une plus-value énorme, multipliée par deux par exemple. C’est très bien mais cela veut dire que si vos enfants sont primo accédants, il faudra qu’ils achètent des biens qui sont 2 fois plus chers ? Et vous d’ailleurs, si vous devez acheter un nouveau bien, cela sera aussi deux fois plus cher. Votre plus-value partira dans la poche du propriétaire de votre nouveau bien. Et puis, en 2022, on était au maximum de la capacité d’achat de la grande majorité des gens. Il n’y aura plus de plus-values possibles.

En savoir plus :

Retrouvez l’ensemble de l’interview d’Olivier Berruyer d’ Élucid sur la chaîne Youtube d’AuCOFFRE.com pendant la Rencontre Annuelle 2023.

Titre : Vidéo intitulée : CRÉDITS, TAUX D'INTÉRÊT, PRÊTS : LA CRISE IMMOBILIÈRE EN COURS... avec Olivier Berruyer, économiste
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Benjamin Rosoor
Je suis entrepreneur sur le web depuis 1999. Diplômé de l'école de journalisme de Bordeaux, j'ai tout d'abord été journaliste-reporter radio pendant 10 ans. J'anime plusieurs médias sociaux et blogs sur les entreprises, la tech, la finance, le marketing digital.

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