Faut-il vendre l’or d’une banque centrale pour éponger la dette publique ?

par | 31 Oct 2025 | Or | 0 commentaires

Temps de lecture : 3 minutes

L’or est une réserve de valeur, un actif de protection contre les crises, pour les particuliers comme pour les banques centrales. Alors une question se pose : peut-il servir à rembourser la dette publique d’un État ? Vu le cours de l’or actuel, la solution peut sembler intéressante… mais ce n’est pas la panacée, loin de là.

Alléger une dette avec de l’or ou changer de stratégie financière : y’en a qui ont essayé

Un précédent en France dans les années 2000

En 2004, Nicolas Sarkozy, alors ministre de l’Économie, annonce la vente de 590 tonnes d’or soit un cinquième des réserves françaises. Les objectifs étaient de réduire les déficits publics et de financer des emplois dans le secteur de la recherche. L’opération, qui s’est déroulée entre 2004 et 2009, devait rapporter 200 millions d’euros par an. Elle a finalement permis d’en récupérer 4,67 milliards au total, selon un rapport de la Cour des comptes de 2012.

Le montant visé a été largement dépassé, mais les bonnes nouvelles s’arrêtent là ! Tout d’abord parce que les ventes n’ont vraisemblablement pas tenu compte des hausses du cours de l’or à l’époque. En effet, le prix avait plus que doublé entre 2004 et 2009, en passant de 400 euros à plus de 900 euros l’once. Et aussi parce que la crise financière est passée par là entretemps, dès 2007. Plutôt que de revendre au rabais, la France aurait pu compter sur son or en période d’incertitude.

L’exemple du Canada

Le Canada ne possède plus la moindre once d’or depuis 2016 : c’est la seule banque centrale du G7 qui a vidé ses stocks ! Cette revente massive est d’autant plus surprenante que le pays a une longue histoire avec le métal jaune et qu’il reste le 4e producteur d’or dans le monde.

Pour le Canada, l’objectif n’était pas tant de soutenir la dette publique, mais plutôt de changer de stratégie. Le pays considère tout simplement l’or comme un actif obsolète, qui ne rapporte rien, et dont les coûts de stockage sont trop élevés.

Une histoire racontée plus en détails dans cette vidéo :

Pourquoi la vente de l’or n’est pas une solution idéale pour rembourser la dette

La dette qui valait 3 305 milliards : les stocks d’or français ne font pas le poids

La solution n’était pas convaincante il y a 20 ans, elle ne l’est toujours pas actuellement : avec l’exemple de la France, il suffit de laisser parler les chiffres. Rappelons que les réserves d’or françaises s’élèvent à 2 437 tonnes, ce qui n’est pas rien. Il s’agit même de la 4e réserve de métal jaune dans le monde après les États-Unis, l’Allemagne et l’Italie (chiffres du World Gold Council).

Et pourtant. Avec un cours de l’or actuel autour de 3 400 euros l’once, la valeur du stock d’or de la France correspond à environ 266 milliards d’euros. Le montant de la dette publique, de son côté, atteignait 3 305 milliards d’euros fin 2024. Revendre l’intégralité de l’or détenu par la France ne permettrait même pas d’éponger 10 % de la dette.

Il y aurait des répercussions sur le cours de l’or et les marchés internationaux

Même si les stocks d’or permettaient de rembourser la dette publique, ce ne serait pas sans conséquences pour les marchés financiers et le cours de l’or. Une vente massive d’or aurait comme incidence de faire baisser les prix à l’échelle mondiale… et donc de réduire considérablement la valeur restante dans les réserves des banques centrales. De quoi fragiliser la crédibilité d’un État par rapport à d’autres économies, et affecter la confiance des investisseurs. Dans le cas de l’UE, la Banque Centrale Européenne a aussi son avis à donner en matière de gestion des réserves d’or, même si les États membres en sont propriétaires.

À lire aussi : Banques centrales, la poursuite de la ruée vers l’or

Revendre l’or des banques centrales, une décision à contre-courant

Depuis une dizaine d’années, la tendance pour les banques centrales est plutôt à l’achat et au stockage d’or, qu’à la revente. C’est encore plus vrai aujourd’hui, à l’heure où le contexte international est particulièrement incertain : guerre en Ukraine, application des droits de douane par Donald Trump, tensions au Proche-Orient, etc. De nombreux pays décident ainsi de renforcer leurs réserves de métal jaune. C’est notamment le cas de la Pologne, qui est le 1er acheteur d’or depuis 2024 avec comme but de soutenir sa monnaie (même si la Pologne fait partie de la zone euro, elle a conservé le złoty). Pour un pays, se séparer de son or reviendrait surtout à se priver d’un moyen de diversification et à se montrer plus vulnérable face à une crise : ce n’est pas le moment.

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Garrigues, Sophie

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