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Dans le cadre de la Rencontre Annuelle AuCOFFRE 2022, diffusée sur la chaine Youtube AuCOFFRE.com du 28 novembre au 3 décembre prochain et dont le thème est « Les guerres de demain », Ludovic Woets, directeur de deux sociétés spécialisées dans la géopolitique et le renseignement, analyse un monde en transtension et se projette sur les potentiels conflits à venir dans le monde. Morceaux choisis.

Ludovic Woets
Ludovic Woets. CR @Aucoffre.com

Nous observons que le conflit en Ukraine a pris une forme « conventionnelle », classique, armée, et non cyber comme certains le prévoyaient pourtant, qu’en est-il ?

Ludovic Woets : « Si l’on se limite aux écrits de prospective militaire, la description des guerres futures se fait sous l’angle de cyberguerres, de guerres électroniques, expliquant que c’est là-dessus qu’il faut investir et que le char et l’artillerie lourde sont des moyens dépassés. Mais la guerre au Mali, par exemple, du moins les opérations militaires que la France a effectuées au Mali depuis 2012, nous les avons faites avec des moyens lourds. Nous avons plus tiré d’obus au Mali qu’en Afghanistan. Des moyens lourds étaient donc déployés au Mali à tel point qu’un des chefs d’Etat-major de l’armée française disait que la guerre au Mali était une guerre de haute-intensité. L’armée française est une armée qui a été transformée, d’abord professionnaliser avec Jacques Chirac, avant de devenir une armée de projection et d’échantillonnage. Le mot « échantillonnage » peut choquer, mais c’est la réalité. On nous annonce de grands chiffres alors que la réalité est tout autre. On va nous dire que nous possédons X avion de combat, mais ce qu’il est pertinent de savoir, c’est plutôt combien nous en avons qui sont en permanence en état de voler et d’accomplir leur mission de dissuasion et de police du ciel. Réponse ? Aujourd’hui, nos moyens sont plus que comptés. Depuis 1989, la logique des différents gouvernements a été de faire des économies sur le dos de la Défense française. Si Vladimir Poutine attaque l’Ukraine en février 2022, c’est aussi parce que nous n’avons pas réussi à le dissuader assez. Pour nous Français, quand nous parlons de dissuasion, on parle bien entendu de dissuasion nucléaire, mais n’oublions pas que le stade avant la dissuasion nucléaire, c’est celui de pouvoir montrer les muscles, qu’on puisse affirmer : « Attention, nous somme en capacité de te dissuader ». Cette forme de dissuasion conventionnelle, nous ne l’avons pas. Jean-Dominique Merchet, journaliste spécialisé dans les questions de Défense, disait récemment que l’armée française était en capacité de tenir un front de 80 kilomètres, ce qui est très court… »   

Pour vous, où et quand se déclenchera la prochaine guerre ?

L.W. : « Aujourd’hui, je suis extrêmement inquiet de voir quelles vont être les ambitions de la Turquie vis-à-vis des îles grecques en 2023 ! Si vous me demandez aujourd’hui quelle sera la prochaine guerre, celle qui vous fait le plus peur en termes de délais, de temps ? Eh bien je vous dirais que je crains que les relations entre la Turquie et la Grèce se dégradent fortement dans les six prochains mois, avec potentiellement des affrontements. Pourquoi ? Si vous observez bien, 2023 va être une année charnière pour la Turquie. D’abord, le pays va fêter deux centenaires : celui du Traité de Lausanne et celui de la République turque. Qui plus est, les élections présidentielles turques auront lieu du 18 juin au 2 juillet 2023. Deux centenaires historique plus une élection présidentielle, l’année peut être difficile car le président turque Recep Tayyip Erdoğan, en difficulté, risque de jouer l’un avec l’autre et qu’il a un adversaire idéal avec la Grèce… cela provoquera probablement une période de tensions. »

Quid de la Chine ?

L.W. : Avant l’épisode du mandat à vie de Xi Jinping, la Chine avait inscrit sa stratégie dans le temps long. Elle a toujours dit que son horizon était l’année 2049, date du centenaire du Parti communiste chinois (encore une fois, un centenaire, comme quoi les dates comptent pour les peuples et dans l’imaginaire politique !). A cette date, la Chine disait qu’elle serait redevenue la première puissance mondiale. Mais nous sommes dans une accélération du temps. Il y a encore quelques années, on estimait que l’Inde dépasserait la Chine en population en 2032, or aujourd’hui les chiffres indiquent que la population indienne va dépasser la population chinoise avant 2027, c’est-à-dire demain matin ! C’est un bouleversement énorme ! Première fois dans l’histoire de l’humanité que la Chine ne sera pas le pays le plus peuplé ! Qui plus est, elle se fait dépasser par l’Inde, pays situé dans la même sphère géographique. Là, on a un renversement historique, donc potentiellement un affrontement. Un conflit entre la Chine et l’Inde est un scénario possible. En outre, nous avons une deuxième accélération du tempo de l’histoire. Lorsque Xi Jinping s’octroie un mandat à vie, il nous envoie comme message que la réunification de Taiwan doit avoir lieu de son vivant. Rappelons qu’il a déjà 69 ans, ce qui raccourcit le temps d’une réunification avec Taïwan. La probabilité d’une intervention chinoise à Taiwan est bien évidemment scrutée par tout le monde. Dernièrement, les exercices chinois d’embarquement et de débarquement de matériel militaire dans des ferries civils nous alerte sur ce que la Chine est en train de préparer…

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Benjamin Rosoor
Je suis entrepreneur sur le web depuis 1999. Diplômé de l'école de journalisme de Bordeaux, j'ai tout d'abord été journaliste-reporter radio pendant 10 ans. J'anime plusieurs médias sociaux et blogs sur les entreprises, la tech, la finance, le marketing digital.

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