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En prouvant la bonne santé de l’économie américaine, les statistiques de l’emploi aux USA tirent l’économie mondiale vers le haut depuis des années. Mais que se passera-t-il quand tout le monde comprendra que ces chiffres sont totalement faux ?

En France, on aimait à dire que « quand le bâtiment va, tout va« . C’est encore un peu le cas, mais dans une économie désormais mondialisée, les indicateurs de bonne santé économique sont eux aussi à l’échelle mondiale : marchés financiers internationaux, équilibres géopolitiques, orientations majeures sur le plan technologique et scientifique, etc. Mais il est pourtant un élément assez isolé qui semble conditionner le moral des places financières du monde entier, et par-là même, le comportement des investisseurs. En gros, un indicateur dont la fragilité, ou au contraire la solidité, peut bouleverser du tout au tout l’économie mondiale. Cet élément, c’est l’économie américaine.

Les États-Unis comme repère de la santé économique mondiale

Que ce soit à travers le dollar (dont on a fait l’étalon monétaire par excellence depuis presque cinq décennies) ou encore leur politique qui peut faire et défaire l’équilibre de régions du monde tout entières, les États-Unis sont devenus à la fois les principaux acteurs, mais aussi les arbitres et même les décideurs de l’économie mondiale.

C’est pourquoi les marchés financiers, qui sont censés s’équilibrer, retiennent en fait toujours leur souffle tant que le Dow Jones n’a pas donné le « La », histoire de ne pas aller à contre-courant. Il suffit que les responsables de la FED programment une allocution pour que tout le monde économique et financier se fige dans l’attente de ce que l’Oncle Sam décidera.

Les États-Unis sont parfaitement conscients de cette situation, et c’est même le but qu’ils ont toujours cherché à atteindre. D’une certaine manière, ils sont un peu les « maîtres du monde », et c’est d’ailleurs pourquoi ils voient d’un si mauvais œil la montée en puissance inexorable de la Chine dont la détermination, la démographie ainsi que la force industrielle et commerciale risquent fort de faire pencher la puissance planétaire vers l’Extrême-Orient à plus ou moins brève échéance.

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Une communication résolument et systématiquement optimiste

Ainsi, depuis la seconde administration Obama, et à plus forte raison depuis la crise de 2008, les États-Unis multiplient les initiatives audacieuses (baisse des taux d’intérêt par exemple), les politiques monétaires ultra accommodantes (QE), les actions fortes en faveur des nouvelles économies d’une part et en soutien des économies traditionnelles d’autre part, jonglant entre passé glorieux et avenir prometteur à grands coups d’annonces excessivement optimistes.

Et parmi ces annonces qui ne cessent de démontrer la solidité de l’économie américaine, sa résilience aussi face aux crises systémiques qui auraient pu la mettre à terre, on trouve les communiqués mensuels sur les nouvelles créations d’emplois aux États-Unis. Pas un mois, pas un trimestre sans que la Grande Amérique fasse mieux que la fois d’avant. Les entreprises américaines se portent bien, très bien même, elles créent des emplois sans discontinuer (au point qu’on finirait presque par se demander s’il n’y aura pas un jour moins d’Américains que d’emplois à pourvoir).

Un taux de plein emploi justifiant les dérives de la FED

Aujourd’hui, on nous dit que l’économie US connaît le plein emploi avec tantôt 4,4%, tantôt 5,1% ou encore 4,7% de chômage suivant les modes de calcul utilisés. Et cette seule information suffit à démontrer que les États-Unis ont dépassé la crise depuis longtemps, qu’ils ont rétabli une situation meilleure encore que celle qui prévalait avant la crise. Elle justifie également la politique monétaire débridée de la Réserve fédérale qui alimente l’économie en dizaines de milliards de dollars chaque mois depuis 7 ou 8 ans maintenant.

Et puisque ça fonctionne pour eux, pourquoi pas pour les autres ? La BCE a d’ailleurs emboîté le pas de sa grande sœur outre-atlantique assez vite, et même si on sait aujourd’hui que sa générosité va progressivement se tarir dans les mois à venir, elle n’en a pas moins elle aussi imprimé des montagnes de billets qu’elle a dispensés aux quatre vents en espérant que l’économie européenne, elle aussi, en bénéficierait avec autant de bonheur que l’économie américaine.

L’ennui dans cette jolie histoire c’est que, outre la relative inefficacité du procédé dont les risques se profilent déjà à l’horizon (qu’il s’agisse d’une éventuelle hyper-inflation monétaire ou d’une perte de crédibilité des devises dont la masse étouffe aujourd’hui toute espèce de lien avec l’économie réelle), les belles annonces américaines sur lesquelles l’enthousiasme mondial s’est emballé pourraient bien n’être… que du vent.

L’emploi, la nouvelle fiole du mensonge

Souvenons-nous du Général Powell agitant en pleine conférence de l’ONU sa petite fiole de toxine qui devait prouver que l’Irak procédait à des frappes biologiques sur des populations civiles. On connaît la suite de l’histoire, la guerre du Golfe, les milliards dépensés et ceux, bien plus nombreux, gagnés en retour non seulement grâce au pétrole mais  au progrès technologique financé par les contribuables. On sait aussi aujourd’hui qu’il n’y avait rien dans cette fiole.

Aujourd’hui, plus de fiole, mais des communiqués selon lesquels l’Amérique est le plus grand, le plus riche et le plus solide pays du monde. L’été dernier, un rapport passé plutôt inaperçu de l’agence Morningside Hill Capital Management  a montré que 93% des emplois prétendument créés depuis 2008 n’avaient en réalité jamais existé.

Ou plutôt si, mais uniquement sur de jolis tableaux informatiques qui s’appuyaient sur une particularité du système de comptage des demandeurs d’emploi aux États-Unis. Car pour être considéré comme « demandeurs d’emploi » chez l’Oncle Sam, et donc être inscrit sur les listes de « chômeurs », il faut avoir effectué une démarche volontaire de recherche d’emploi durant le mois précédent (je schématise). À défaut, vous n’êtes plus considéré comme demandeur d’emploi. Ainsi, officiellement, les États-Unis comptent environ 8 millions de chômeurs déclarés… mais en réalité, il faudrait y ajouter 94 millions d’Américains en âge de travailler sans emploi . C’est en tout cas la conclusion du Bureau of Labor statistics publiée sur le site gouvernemental du département du travail américain.

Une nouvelle Grande Dépression masquée ?

Et là, ça devient tout de suite plus embêtant. Parce que si nous devions calculer le taux de chômage réel des USA, et même en enlevant quelques milliers de riches oisifs ainsi qu’une bonne moitié des 20 millions d’étudiants américains qui auraient éventuellement choisi de ne pas travailler pendant leurs études (estimations très large), il reste encore beaucoup, beaucoup de sans-emploi aux USA.

Des économistes ont estimé que la situation est comparable à celle qui prévalait durant la Grande Dépression des années 1930. Difficile dans ces conditions de se prétendre moteur d’une reprise mondiale flamboyante.

Comment croire alors que la BCE ne fait pas fausse route depuis des années en calquant sa politique accommodante sur celle de la FED ? Comment expliquer à des millions de gens que l’économie pour laquelle ils travaillent de plus en plus dur en espérant pouvoir en vivre, épargner, prendre leur retraite malgré les ponctions gouvernementales de plus en plus sévères, comment leur dire donc que tout cela n’existe pas en réalité et qu’il s’agit juste d’un mensonge destiné à repousser le plus longtemps possible le moment où le trou abyssal de nos pertes ne pourra plus être caché ? Car là encore, c’est le monde entier qui pourrait être impacté par le mensonge de ce pays qui se prétend le phare de l’économie planétaire.

Continuer la fuite en avant ou tout arrêter ?

Alors quoi ? Va-t-on continuer à faire semblant et se dire que tout va bien, qu’il suffit d’empiler encore et encore des tas de billets en euros, en dollars, en yens, et d’en inonder le réseau bancaire en espérant qu’il va à son tour prêter cette monnaie de singe à des entreprises qui iront ensuite créer de la richesse dont la contrepartie monétaire va devenir de plus en plus difficile à estimer ?

Va-t-on commencer à envisager l’éventualité de ces fameux « revenus universels » (toujours en devises fabriquées ex-nihilo, au passage) dont on nous parle avec insistance depuis quelques années, un peu comme si nos politiques nous préparaient lentement à l’aveu d’impuissance auquel ils doivent faire face et qui les a conduits, depuis 10 ou 15 ans maintenant, à nous mentir ? Ou bien va-t-on imaginer de remettre à plat l’économie mondiale sur la base d’une nouvelle forme de valorisation des richesses, incluant peut-être ces stocks de métaux précieux que les banques centrales accumulent plus ou moins discrètement depuis plus d’une décennie ?

Nul ne le sait. Mais ce qui est sûr c’est qu’une économie mondiale basée sur un mensonge dont les citoyens sont les premières victimes (inflation, chômage, spoliation…) a peu de chance de se solder par une simple tape sur les doigts ou un quitus indulgent à l’égard de ceux qui nous auront manipulés. Espérons seulement que la prise de conscience ne se soldera que par un « simple » krach, même monumental, mais dont les seules conséquences seront financières. Car, dans notre histoire, on a connu des soulèvements populaires et des mouvements de violence généralisée pour bien moins que cela.

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Anthony Alberti
Entrepreneur depuis vingt ans dans le domaine de la communication et l'information stratégique, il a été amené à travailler plusieurs fois en partenariat avec des banques et des assurances, dont la principale matière d'œuvre était constituée de l'argent des épargnants. Peu complaisant à l'égard de leurs pratiques dont il a entrevu les coulisses, il délivre aujourd'hui régulièrement son analyse sans concession (et souvent piquante) non seulement sur les agissements des professionnels de la finance, mais aussi de tous ceux qui, de près ou de loin, se font les auteurs ou les complices des manipulations qui spolient chaque jour un peu plus les honnêtes citoyens.

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