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La crise de 1929 a marqué les esprits autant que les livres d’histoire. Mais celle de 2008 est toute aussi présente – et beaucoup plus qu’on ne pense. Dix ans après la crise financière majeure de 2008, on peut légitimement se poser la question : est-ce qu’on en réellement tiré les leçons ? Comment se protéger au mieux de la prochaine tempête financière ?

2008-2018, une décennie perdue ?

Quand on parle de la crise de 2008, il faut en fait aller chercher un peu plus tôt pour voir les premiers effondrements. Le 9 août 2007, plus précisément. Ce jour-là, alors que la crise couve déjà autour des subprimes aux Etats-Unis, certains établissements bancaires – notamment BNP Paribas – gèlent des fonds investis sur des actifs immobiliers américains. Journée noire, et panique sur les marchés : dans un contexte de surendettement des ménages américains et de bulle immobilière, le système financier américain vacille. Les taux immobiliers américains remontent soudainement, et des millions de ménages américains se retrouvent face à des remboursements beaucoup plus importants que prévus. Résultat : incapables de rembourser leurs crédits, ils perdent leurs maisons. L’été 2007 est celui des saisies immobilières aux Etats-Unis, et les panneaux « Foreclosure » fleurissent sur les pelouses. Des millions de ménages américains perdent leurs propriétés, et les banques perdent leurs milliards.

Le reste du monde a pourtant encore presque une année de répit. Jusqu’au 15 septembre 2008 : ce jour-là, le PDG de Lehman Brothers déclare la banqueroute. L’économie mondiale déraille, à mesure que la quatrième plus grosse banque américaine livre le compte de ses milliards de dollars de dettes. Quelques jours plus tard, les marchés sont gelés. La crise s’étend aux banques européennes liées de près ou de loin à la bulle immobilière aux Etats-Unis. On parle d’une « entrée en récession des grandes économies mondiales ».

Et la crise dure près de dix ans, moins pour les pays les mieux lotis. Si la reprise de la croissance se fait sentir en 2016, elle n’est réellement confirmée qu’en 2017 dans la zone européenne. En un peu moins d’une décennie, plusieurs pays font économiquement les frais de cette crise majeure. C’est le cas en Grèce ou à Chypre. Rappelons-nous la façon dont la Grèce a été frappée, et comment le fonctionnement du pays a été bouleversé. En Espagne, une politique d’austérité est menée de 2008 à 2012, avec des mesures d’austérité très dures pour les Espagnols. Dans plusieurs pays d’Europe – et réellement à nos frontières, les conséquences sont dévastatrices. Une décennie perdue, donc. A moins qu’on en ait tiré les leçons, mais est-ce réellement le cas ?

Dix ans plus tard,
les choses ont-elles vraiment changé ?

Une décennie plus tard, des mesures ont bien sûr été prises. Les grandes banques ont renforcé leurs fonds propres. Selon Les Echos.fr, elles auraient ainsi « doublé leur capitalisation rapportée à leurs actifs financiers » entre 2007 et 2015. Les modèles ont été revus pour répondre à une nouvelle donne réglementaire, et aux mécanismes de régulation de la spéculation. Les banques américaines, les plus fortement touchées – et celles qui ont été touchées en premier -, ont aussi été les premières à mettre en place une restructuration.

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Pour assurer une certaine stabilité du système financier, les Etats et les banques centrales ont commencé par injecter des liquidités. Elles poussent désormais les particuliers et les banques à faire de même, en adoptant des politiques d’assouplissement monétaire : il s’agit de rendre l’épargne moins attrayante, et le crédit plus intéressant. Pousser les gens à dépenser leur argent ou à investir, en somme, pour conserver des liquidités dans le système.

La crise semble passée. Il y a quelques jours, la Bourse de Paris a retrouvé son plus haut niveau depuis le 31 décembre 2017, soit son plus haut niveau depuis la crise. C’est d’ailleurs « l’un des derniers pays à retrouver le niveau de cours que connaissaient les grandes valeurs avant la crise », relève RTL.fr. Qui rappelle que les Etats-Unis avaient déjà retrouvé leur niveau d’avant la crise en 2013 : le Dow Jones est aujourd’hui « deux fois supérieur à celui de l’avant-crise ».

Pour autant, la crise a laissé des séquelles bien visibles. Le taux de chômage chez les jeunes est plus élevé, tout comme celui du chômage de longue durée. Et si on peut parler de reprise, les experts économiques sont de plus en plus nombreux à évoquer des signes avant-coureurs.

Ces premiers éléments
qui inquiètent et qui alertent

Si les premiers signes avant-coureurs sont aussi visibles, c’est surtout parce qu’il s’agit toujours du même élément : l’endettement. Je le disais plus haut : pour pousser les particuliers à injecter des liquidités, les banques proposent des emprunts à taux plus bas. Aux Etats-Unis, on ne parle plus uniquement de la dette liée au logement, mais aussi d’emprunts à taux bas dans d’autres secteurs. Le crédit auto, tout comme le crédit étudiant, sont devenus ces dernières années les nouveaux « subprimes » américains. Résultat ? Une dette privée qui augmente de plus en plus. Selon LesEchos.fr, les crédits subprime automobile aux Etats-Unis représenteraient ainsi 179 milliards de dollars d’encours fin 2016. Et cela augmente encore, alors que les retards de paiement s’accumulent aussi sur les prêts étudiants. Premier signal d’alarme majeur : on prend les mêmes et on recommence !

Autre élément inquiétant, le recours à des pratiques financières pas toujours lisibles pour les acteurs du marché. La faiblesse des taux, ainsi que les contraintes règlementaires, entraînent par exemple la multiplication du recours à la titrisation, technique financière qui consiste à regrouper des crédits et à les transformer en titres négociables sur les marchés. Et cela ne concerne pas que les Etats-Unis ou l’Europe, mais aussi la Chine d’après LesEchos.fr… une puissance économique majeure. « Les banques y recourent à des montages de titrisations complexes pour se délester d’actifs toxiques. Une trentaine d’entre elles totaliseraient 2.000 milliards de dollars de ce type de créance… un montant multiplié par six en quatre ans », relève le site d’actualités. Les tentatives de régulation bancaire peuvent aussi pousser au Shadow banking », avec des effets méconnus sur la finance traditionnelle. Certaines administrations – c’est le cas de l’administration Trump aux Etats-Unis – ne cachent pas non plus leur volonté de sortir des mécanismes de régulation.

Le choc semble donc inévitable. Toute la question est donc de savoir quand la prochaine crise aura lieu – et non pas si. Et quels mécanismes de protection auront pu être mis en place d’ici là, dans un contexte où nous savons désormais que même les pays peuvent faire faillite !

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Jean-François Faure
Jean-François Faure. Président d’AuCOFFRE.com. Voir la biographie.

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