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Bien plus que ce n’est le cas du prix de l’argent, le cours de l’or est déterminé par la confrontation de l’offre et de la demande de métal physique. Quel a été le rapport de force entre les différentes composantes de ce marché en 2021 ? Le Conseil mondial de l’or dresse le bilan.

Le World Gold Council (WGC), ou Conseil Mondial de l’or (CMO), est (en pratique) le représentant de l’industrie d’exploitation minière occidentale. Entre autres rapports, cet organisme publie chaque trimestre ses « Gold Demand Trends » (GDT), ou « Tendances de la demande d’or », et ce depuis 1992, soit 5 ans après sa fondation.

L’année passée, je vous avais proposé une analyse des « Gold Demand Trends Full year and Q4 2020 » en deux volets (voir ici et ).

Les « Gold Demand Trends Full year and Q4 2021 » ayant été publiées le 28 janvier 2022, le moment est venu de vous brosser un tableau à jour de la situation de l’offre et la demande de métal physique sur le marché de l’or.

A 4021 tonnes, la demande d’or en 2021 est en hausse de 10%

Comme vous le savez, l’once d’or a enregistré une performance mitigée de +2,9% en euros (et -3,5% en dollars) en 2021. Comment les différents segments de la demande se sont-ils comportés ?

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Comme l’indique le CMO, « La demande d’or pour l’année 2021 (hors demande de gré à gré *) a augmenté pour s’établir à 4 021 tonnes sur l’année », […] « récupérant ainsi une grande partie du déficit de demande subi en 2020 à cause de la Covid. »

(* Comme je l’expliquais l’année passée, le CMO n’est pas omniscient au sujet des transactions qui se déroulent sur le marché de l’or. Lui échappent en particulier les transactions de gré à gré. D’où la rubrique « OTC [over-the-counter] and more » (nouvelle appellation de la rubrique « Excédant/Déficit ») qui désigne « la différence entre l’offre totale et la demande d’or. En partie un résidu statistique, ce chiffre englobe également la demande sur le marché de gré à gré et les variations des stocks sur les bourses de matières premières, avec une contribution supplémentaire des variations des stocks de fabrication. »)

Pour ce qui est de la demande d’or en 2020, elle a été révisée de 3759,6 tonnes à 3658,8 tonnes. La demande d’or a donc augmenté de près de 10% entre 2020 et 2021 – ce qui n’est pas un exploit alors que 2020 reste « la première année [avec une demande] inférieure à 4000 tonnes depuis 2009 ».

(N.B. : si le tableau est trop petit, je vous renvoie à la source afin que vous puissiez le consulter dans une résolution plus élevée.)

Comme le remarqueront les habitués des GDT, le CMO a complètement refondu la présentation de ses statistiques, ainsi que sa terminologie.

Les 2 anciens tableaux (« Demande d’or en tonnes » et « Offre et demande d’or – présentation du CMO ») ont été fusionnés dans un nouveau tableau unique présentant toutes les composantes de l’offre et de la demande globales. L’objectif est triple : rendre ces statistiques plus lisibles ; éliminer une source de confusion en mettant un terme à la dualité des statistiques relatives à la demande d’or qui découlait de la présence de deux méthodes de calcul ; tout cela en alignant la présentation de ces statistiques sur le modèle utilisé par Qaurum, l’outil d’évaluation du cours de l’or élaboré par le CMO (et ce en calculant la demande d’or en utilisant la mesure de la demande en provenance de la bijouterie plus en amont de la chaîne d’approvisionnement). On ne peut que se réjouir d’une telle évolution.

Bijouterie et technologie : la demande d’or de retour à ses niveaux pré-pandémiques

Dans les détails, la demande en provenance du secteur de la bijouterie (c’est-à-dire la demande de fabrication, et non les ventes de bijoux) s’est montée à 2220,9 tonnes, soit une augmentation de 67% sur l’année. Suite à cette très forte reprise, cette composante de la demande rejoint ses niveaux pré-pandémiques, alors qu’elle avait atteint en 2020 le niveau annuel le plus bas jamais enregistré dans les GDT du CMO.

Demande mondiale annuelle d’or en provenance du secteur de la bijouterie en volume et en valeur : la reprise économique et la baisse des prix ont fait remonter la demande de bijoux aux niveaux pré-pandémiques

La demande s’est accrue dans quasiment toutes les économies, avec une mention spéciale pour les épargnants indiens qui ont quasiment doublé le montant de leurs achats annuels.

La demande en provenance du secteur de la technologie (330,2 tonnes) a quant à elle augmenté de 9%. Rien d’étonnant suite à la levée progressive des confinements et l’atténuation de la pandémie.

Demande annuelle d’or en provenance de la technologie par sous-secteur : le secteur de la technologie s’est rapidement remis de la pandémie, grâce à une forte demande en provenance de l’électronique

Banques centrales : la demande en hausse de 82%, le stock mondial d’or au plus haut depuis 1992 !

Vient ensuite la demande en provenance des banques centrales qui ont accumulé 463,1 tonnes d’or en 2021, soit une hausse de 82% par rapport à 2020. Cela porte les stocks officiels de métal jaune juste en-dessous de 35 600 tonnes, « un plus haut de près de 30 ans », précise le CMO. Pour rappel, ce segment de la demande s’était effondré de 59% en 2020 pour se monter à un très modeste 255 tonnes.

Achats annuels nets d’or par les banques centrales (tonnes) : la demande a rebondi en 2021 après avoir atteint son niveau le plus bas de la décennie

A fin 2021, cela fait donc 12 années consécutives que les banques centrales sont repassées à l’achat, pour un total de 5692 tonnes sur l’ensemble de la période.

Mais quelles banques centrales ont relouchifié en métal jaune ?

Comme le relève le CMO, « Dans la continuité de la tendance établie, un grand nombre de banques centrales des marchés émergents ont acheté de l’or, démontrant ainsi l’ampleur de l’intérêt [pour ce métal]. »

La suite est encore plus intéressante : « Cependant, contrairement à la tendance établie, les achats ne se sont pas limités aux marchés émergents. Pour la première fois depuis près de 10 ans, nous avons assisté à des achats significatifs de la part des banques centrales des marchés développés. » Et le CMO de relever les achats de Singapore (26 tonnes) et de l’Irlande (3 tonnes). L’ampleur de ces achats est également remarquable. En effet, « Si d’autres banques centrales de pays développés ont augmenté leurs réserves d’or ces dernières années, cela s’est généralement produit à un rythme beaucoup plus lent. Par exemple, la Grèce a augmenté ses réserves d’or de plus de 2 tonnes, mais cela s’est produit sur une période de 10 ans », précise le CMO.

Achats et ventes nets individuels des banques centrales en tonnes : en 2021, les banques centrales ont été nombreuses à acheter, y compris les banques des pays développés

Seules 6 banques centrales ont procédé à des ventes nettes, dont la Bundesbank. Berlin est-elle en train de se débarrasser de son or ? Pas du tout ! Comme l’indique le CMO, cette vente « de l’Allemagne était probablement liée à son programme de frappe de pièces de monnaie prévu de longue date. »

En somme, « Le large éventail d’achats effectués en 2021 a montré que l’appétit pour l’or en tant qu’actif de réserve reste important », conclut le CMO. Les facteurs relevés par le CMO dans le cadre de son sondage réalisé auprès des banques centrales en mai 2020 sont donc plus que jamais d’actualité.

Reste la demande d’investissement.

Et là, le tableau n’est plus du tout le même qu’en 2020, comme je vous l’expliquerai la semaine prochaine…

A lundi !

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Nicolas Perrin
Diplômé de l’IEP de Strasbourg, du Collège d’Europe et titulaire d’un Master 2 en Gestion de Patrimoine, Nicolas Perrin a débuté sa carrière en tant que conseiller en gestion de patrimoine. Auteur de l’ouvrage de référence "Investir sur le Marché de l’Or : Comprendre pour Agir", il est désormais rédacteur indépendant. Il s’intéresse au libéralisme, à l’économie et aux marchés financiers, en particulier aux métaux précieux et aux crypto-actifs, sans oublier la gestion de patrimoine. Twitter : @Nikookaburra

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