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C’est par un discret communiqué que le service historique de la Défense a lancé une campagne de mécénat participatif pour acquérir un plan de la bataille de Velez-Malaga. Particularité de cette campagne : elle passera par un spécialiste du crowdfunding sur Internet.

Décidément, l’économie numérique ne cesse de s’insinuer de plus en plus intimement dans le fonctionnement de nos institutions, y compris celles que l’on considère habituellement comme les plus conservatrices.

Compenser les budgets en baisse avec le financement participatif

Ainsi, afin d’enrichir ses collections, le Service historique de la Défense (SHD), qui conserve les archives militaires françaises depuis le XVIIe siècle sur près de 450 kilomètres linéaires et qui compte la plus grande bibliothèque d’Europe spécialisée en histoire militaire avec un million de documents, a lancé le 11 mai dernier une opération de mécénat visant à faire entrer dans les collections nationales un plan détaillant l’ordre de la bataille navale de Velez-Malaga, daté de 1704. Prévue pour durer jusqu’au 19 juillet 2016, cette campagne de collecte utilisera pour la première fois un site de financement participatif, en l’occurrence la plateforme française de collecte de dons Culture Time, spécialisée dans la levée de fonds au profit de projets culturels.

Compte tenu des ressources financières de plus en plus contraintes (son budget a subi une baisse de 45% en un an), le SHD voit souvent des pièces exceptionnelles lui échapper au profit de collectionneurs privés, parfois domiciliés à l’étranger. Cette fois-ci, devant l’intérêt majeur du document, le service des archives militaires a décidé de jouer le jeu du financement 2.0. Une initiative judicieuse et étonnamment moderne pour une institution généralement bien plus « conservatrice ».

Grâce à cette opération, le SHD espère récolter 20 000 euros au titre du mécénat participatif, le reste des 75 000 euros demandés par le vendeur étant couvert par le budget que le service des archives militaires consacre habituellement à ce genre d’acquisitions.

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Un véritable trésor historique

Le plan de la bataille navale de Velez-Malaga, dont il n’est connu aucun équivalent au monde, est un document manuscrit peint en couleur datant du début du XVIIIe siècle. Il représente l’opposition entre la flotte franco-espagnole à la flotte anglo-hollandaise au large de Malaga (Espagne) en 1704. La bataille, l’une des dernières du roi Louis XIV, et qui tourne à l’avantage de la flotte française, est riche en enseignements tactiques. Elle nous est parvenue grâce au travail patient et minutieux d’un jeune officier servant sur l’un des navires engagés, Jérôme Hélyot, qui nota alors tous les détails de l’affrontement.

Constitué de plusieurs feuilles de papier collées sur une bande de toile, entièrement peint à la main, le document se présente sous la forme d’un rouleau de 6,53 m de long sur 0,66 m de haut. Très documenté, le plan reprend la description mais aussi la position des 194 bâtiments de guerre qui s’opposaient, constituant ainsi un témoignage unique et une source documentaire de premier plan sur les guerres maritimes du Roi-Soleil. Hélyot y décrit notamment l’utilisation rationalisée de l’artillerie (il sera quelques années plus tard chargé de dispenser ses connaissances en matière de maniement du canon à la mer) ainsi que le rôle joué par les galères pour la dernière fois de l’histoire. Il indique également pour chaque bateau, outre son nom et celui de son commandant, son armement en hommes et en canons.

Nul doute que les scientifiques comme les historiens trouveront dans ce document exceptionnel matière à entamer ou compléter leurs recherches.

À noter que, comme pour toute action de mécénat, les dons bénéficient d’un avantage fiscal de 66% pour les particuliers et de 60% pour les entreprises.

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Anthony Alberti
Entrepreneur depuis vingt ans dans le domaine de la communication et l'information stratégique, il a été amené à travailler plusieurs fois en partenariat avec des banques et des assurances, dont la principale matière d'œuvre était constituée de l'argent des épargnants. Peu complaisant à l'égard de leurs pratiques dont il a entrevu les coulisses, il délivre aujourd'hui régulièrement son analyse sans concession (et souvent piquante) non seulement sur les agissements des professionnels de la finance, mais aussi de tous ceux qui, de près ou de loin, se font les auteurs ou les complices des manipulations qui spolient chaque jour un peu plus les honnêtes citoyens.